Péricarde/Epanchement/Hémorragie

Les épanchements péricardiques hémorragiques peuvent s’observer après chirurgie cardiaque, suite à un traumatisme, comme complication d’un traitement anticoagulant ou en cas de tumeur maligne.

A la phase subaigue (dans les premiers jours et semaines), l’élément caractéristique évoquant une hémorragie est l’HETEROGENEITE du signal quelque soit la pondération utilisée (T1, T2, écho de gradient). Ceci s’explique par la présence simultanée de composantes hémorragiques d’âge variable avec du sang liquide et des portions thrombosées (caillots) plus ou moins anciennes contenant des produits de dégradation de l’hémoglobine aux propriétés paramagnétiques variables selon leur ancienneté.

Le tableau ci-dessous rappelle les caractéristiques principales du signal péricardique selon le type de pathologie

ES T1 ciné (GRE, SSFP)
Epanchement hyposignal hypersignal
Hémorragie hétérogène hétérogène
Epaississement hyposignal hyposignal

Les figures ci-dessous illustrent cette hétérogénité de signal en cas d’hémorragie chez un patient de 66 ans hospitalisé pour douleurs thoraciques et dyspnée, présentant un volumineux épanchement compressif dans un contexte de traitement anticoagulant avec INR excessif, sans notion de contusion thoracique, ayant nécessité une péricardocentèse en milieu chirurgical qui a permis de retirer 500 ml de liquide hémorragique sans cellule tumorale associée. Un épanchement relativement abondant persite toutefois mais sans prise de contraste anormale après injection de gadolinium, ce qui est en faveur d’un tarissement de l’hémorragie.

Image:huck_T1.jpg Image:huck_T2.jpg
Echo de spin pondéré T1 (TE 9 ms) : épanchement péricardique important très hétérogène prédominant contre les cavités droites Echo de spin pondéré T2 (TE 23 ms) : aspect également hétérogène du signal avec des zones d’hypersignal et des zones d’hyposignal correspondant à des foyers hémorragiques de date variable (portions liquidiennes avec présence de caillots
Image:huck_avant.jpg Image:huck_apres.jpg
Echo de gradient (SSFP) avant injection de gadolinium retrouvant un aspect hétérogène du signal comme en écho de spin Même séquence en écho de gradient réalisée 5 mn apres injection de gadolinium. Pas de prise de contraste significative ce qui est en faveur d’une hémorragie stabilisée, sans suffusion nette persistante.

Image:Hem_per_post-op_michel.jpg

Epanchement péricardique postérieur peu important (15 mm maxi), localisé derrière la paroi postérieure du VG chez un patient de 64 ans opéré quelques semaines auparavant d’un remplacement valvulaire aortique pour IAo. sévère. Le scanner non injecté (A) ne montre que peu d’hétérogénité de densité dans cet épanchement mais l’IRM en écho de spin pondéré T1 (B et C) et pondérée T2 (D) révèle deux composantes distinctes avec une zone centrale en hypersignal correspondant vraisemblablement à un hématome dans ce contexte post-opératoire.

Image:Clois_schmidtTxT1.0001.jpg Image:Clois_schmidtTxT2.0001.jpg Image:Clois_schmidtCT.0001.jpg
Image:hemopericarde_postop_ancien.jpg Echo de spin T1. Exemple d’hémopéricarde chez une patiente présentant une polyarthrite rhumatoide, opérée pour remplacement valvulaire aortique quelques semaines auparavant. Noter l’hétérogénéité du signal intrapéricardique traduisant différentes étapes de dégradation de l’hémoglobine
Image:kuen_.jpg

Volumineux épanchement péricardique atteignant 35 mm d’épaisseur, comprimant les cavités droites, chez un patient de 56 ans présentant une polyarthrite rhumatoïde sévère. L’aspect très hétérogène en écho de spin T1 (A) et en écho de gradient (B), avec serpentin d’hypersignal central, est en faveur d’un épanchement hémorragique organisé. Noter l’absence de rehaussement de signal précoce sur les séquences dynamiques au premier passage de gadolinium (C) et la présence d’un épanchement pleural bilatéral.

Classiquement, l’ancienneté de l’hémorragie peut s’apprécier selon le diagrame de ‘cycle lunaire’ identifiable lors des hémorragies cérébrales ou intraparenchymateuses (cf: comprendre l’IRM, manuel d’auto-apprentissage de B Kastler, Masson éditeur, 6eme édition, page 190 [1]).

Image:cycle_lunaire1.jpg Image:cycle_lunaire2.jpg Image:cycle_lunaire3.jpg Image:cycle_lunaire4.jpg
Hématome suraigu
Sang liquide
Premières heures
T1 long, T2 long
Hypo-T1, hyper-T2
Hématome aigu
Caillot déoxyHb, métHb
Premiers jours
T2 et T2* plus courts
Iso-T1, hypo-T2
Hématome subaigu
Premières semaines
Lyse GB, libère Hb
T1 plus court, T2 court
Hyper-T1, hypo-T2
Hématome chronique
Mois suivants
Phagocytose périphérique
Hypo annulaire, hyper T2 central

Cette séméiologie n’est toutefois pas bien transposable en cas d’épanchement péricardique hémorragique (car il n’y a pas le même environnement parenchymateux qui permet la transformation de l’hémoglobine par les macrophages).

Péricarde/Distinction eau vs graisse

Un problème parfois difficile

Il n’est pas exceptionnel d’être confronté à un aspect échographique suspect de décollement péricardique. En principe, en échographie, un décollement liquidien doit apparaître plus important en systole qu’en diastole, tandis qu’une frange adipeuse paracardiaque présente une épaisseur constante. Cette distinction n’est toutefois pas toujours bien tranchée et le doute diagnostique peut apparaître dans un contexte clinique de douleurs thoraciques à caractère équivoque, avec modifications ECG et éventuellement syndrome inflammatoire biologique, comme dans l’exemple présenté ci-dessous chez une patiente de 56 ans avec douleurs thoraciques et coronarographie normale.

Image:delong_es.jpg
Incidence parasternale grand axe avec décollement postérieur prédominant en systole Incidence échographique petit axe. Décollement péricardique antérieur et postérieur prédominant en systole IRM en écho de spin pondéré T1 de la même patient avec couronne d’hypersignal paracardiaque caractéristique d’une adipose paracardiaque et non pas d’un épanchement liquidien.

En IRM la confusion entre tissu graisseux et épanchement liquidien est presque impossible car les franges adipeuses apparaissent de manière très caractéristique sous forme d’hypersignal intense (similaire à la graisse sous cutanée) en écho de spin pondéré T1 (alors qu’une collection liquidienne apparaîtrait en hyposignal dans cette pondération).

Si le doute persiste, il existe 4 méthodes décrites ci-dessous pour discriminer graisse et eau :

FAT-SAT STIR Excitation sélective PSIR
Préimpulsion de saturationdes graisses Inversion récupérationavec TI 160 ms Excitation sélectivebinomiale eau ou graisse Phase sensitiveinversion-recupération

Péricarde/Abondance et distribution

ABONDANCE DE L’EPANCHEMENT

Il n’est pas possible de préciser de manière simple et fiable l’abondance d’un épanchement en raison de sa distribution volontier hétérogène. Cependant une estimation qualitative de l’épanchement peut s’effectuer visuellement en le qualifiant de mineur si le décollement maximal reste < 10 mm, modéré entre 10 et 20 mm et abondant au-delà. S’il est à peu près circonférentiel, l’ordre de grandeur de l’épanchement peut être approché  :

Epanchement minime < 10 mmvolume < 300 ml Epanchement modéré (10 à 20 mm)volume d’environ 300 à 500 ml Epanchement abondant > 20 mmvolume > 500 ml

Si une quantification est requise (par exemple pour un suivi évolutif dans certains cas particuliers), on peut alors planimétrer les contours externes et les contours internes et calculer le volume avec la méthode des disques de Simpson (voir évaluation de la fonction VG). La différence entre le volume externe et le volume interne correspond au volume de l’épanchement.

Il est important de noter que ce n’est pas l’abondance de l’épanchement qui conditionne la tolérance hémodynamique mais c’est sa vitesse de progression qui est le facteur péjoratif dominant car le feuillet péricardique pariétal nécessite un certain temps pour s’étirer.

DISTRIBUTION DE L’ÉPANCHEMENT

Les épanchements péricardiques peuvent se distribuer de manière variable, volontiers asymétrique lorsqu’ils sont modérés, plus circonférentiels lorsqu’ils sont abondants.

Les épanchements cloisonnés peuvent être difficiles à identifier en échographie en raison des fenêtres d’échogénicité limitées (notamment en inféro-latéral). L’IRM permet facilement le diagnostic grâce à son large champ de vue homogène.

Volumineux épanchement localisé inférieur d’étiologie inconnue bonne tolérance de cet épanchement (même patient, qu’à gauche) Large épanchement relativement abondant localisé en inférieur

SWINGING HEART

Lorsque le décollement péricardique est large et diffus, le coeur flotte entièrement dans l’épanchement, attaché uniquement par les gros vaisseaux de la base. Ses mouvements de contraction entraînent alors un aspect caractéristique de ‘coeur dansant’ ou swinging heart décrit par les échographistes.

Volumineux épanchement circonférentiel Large épanchement avec aspect typique de ‘coeur dansant’. Noter la présence de franges adipeuses épicardiques assez prononcées à l’apex.

Péricarde/Transsudat versus exsudat

IMITES DE LA DISTINCTION TRANSSUDAT – EXSUDAT

On appelle transsudat les épanchements contenant moins de 30 g/l de protéines et exsudat les épanchements de plus de 30 g/l de protéine. Une teneur élevée en proteines inflammatoires induit un raccourcissement du temps de relaxation T1. En principe, on pourrait donc s’attendre à un aspect distinct entre transsudat à T1 long et donc en hyposignal T1 comparativement à un exsudat avec T1 court et donc en relatif hypersignal T1.

Image:epanchement1.jpg Image:epanchement2f.jpg Image:epanchement3.jpg
Aspect en hyposignal homogène, évocateur de transsudat Aspect hétérogène avec hypersignal relatif contre l’oreillette droite (flèche), évoquant la présence de possibles réseaux de fibrine Aspect en hypersignal pouvant évoquer un exsudat
Image:ep_per_fibrine.jpg Ce schéma simpliste est cependant contredit par l’influence d’autres phénomènes ‘parasites’ dont essentiellement les mouvements liquidiens (effets de flux) qui peuvent entraîner des zones d’hypersignal apparent alors même que le liquide d’épanchement est pauvre en protéines.La présence de filaments de fibrine ou de cloisonnements conduit également à des zones d’hypersignal relatif.

En pratique, il est prudent de ne pas être trop affirmatif quant à la nature de l’épanchement qui ne pourra etre assurée que par une éventuelle ponction.

Par contre, en cas d’hémorragie, une franche hétérogénité du signal est visible, dans toutes les pondérations (écho de spin T1, T2 et écho de gradient).

Cordon de fibrine

Image: fibrine_ep_fort_tx_psir.jpg Image: fibrine_ep_fort_oag_psir.jpg

Petite structure mobile, en forme de cordon, moulée autours de l’anneau mitral chez une patiente de 55 ans avec épanchement péricardique moyennement abondant. En l’absence d’hypersignal en imagerie d’echo de spin pondérée T1 et compte tenu de l’absence significative de rehaussement de signal post-gadolinium, l’hypothèse la plus probable est celle d’un cordon de fibrine. Evolution clinique simple avec disparition de l’épanchement et de la masse suspecte.

RECHERCHE D’INDICES ETIOLOGIQUES

Dans tous les cas, il importe de rechercher des épaississements nodulaires ou des irrégularités péricardiques qui pourraient évoquer un processus tumoral. La recherche d’une étiologie tumorale cardiaque ou paracardiaque (broncho-pulmonaire, tumeur ou lymphome médiastinal) est un élément clé de l’examen mais la résolution de l’IRM est ici inférieure à celle du scanner, notamment pour l’identification de petites adénopathies.

Les foyers infectieux pulmonaires peuvent entrainer un épanchement péricardique réactionnel par contiguité. Lorsque l’auscultation n’est pas probante, la graphie thoracique constitue alors le premier examen d’orientation mais certains foyers de pneumopathie peuvent être difficiles à détecter, notamment à la base gauche où ils peuvent être cachés par la silhouette cardiaque, comme dans l’exemple ci-dessous.

Image:elga_face.jpg Image:elga_profil.jpg Bilan d’épanchement péricardique chez une patiente de 57 ans présentant une toux non productive avec syndrome inflammatoire biologique et fièvre décapitée par un traitement antibiotique intempestif.La graphie thoracique montre une discrète opacité de la base gauche qui n’avait pas retenu l’attention en première analyse, traduisant un foyer de pneumopathie, partiellement masqué par l’ombre cardiaque.

Le scanner révèle mieux le foyer de condensation pulmonaire avec persistance d’un bronchogramme aérique et présence d’une petite lame d’épanchement pleural.

Image:elga_paT1b.jpg
Echo de spin T1 OAG cine OAG Echo de spin T1 axial Scanner non injecté

Insuffisance aortique

L’insuffisance aortique correspond au reflux de sang de l’aorte vers le ventricule gauche en diastole en raison d’un défaut de continence de la valve aortique.

Les causes de fuite aortique sont : dégénératives, rhumatismales, sur bicuspidie, sur lésion aortique (dissection ou anévrysme), par prolapsus valvulaire ou par endocardite.

Aspect morphologique

Epaississements valvulaires, recherche de bicuspidie et évaluation de l’aorte ascendante peuvent être bien explorés par l’IRM. Les calcifications ne sont pas directement visibles mais sont suggérées par un hyposignal marqué. Les signes indirects de fuites aortique sont dominés par la surcharge volumétrique et par l’hyperkinésie du VG. La distension du VG (diamètre diastolique > 75 mm ou diamètre télésystolique > 55 mm, ainsi qu’une diminution de l’hyperkinésie (FEVG < 50%) constituent des critères classique (tardifs) d’indication opératoire.

Le signe direct de fuite aortique en IRM est le jet de perte de signal diastolique dans le VG, surtout apparent en écho de gradient à TE long (> 5 ms), moins net en séquences SSFP à TE très court (TE de 1 à 2 ms).

Coupe frontale en ciné SSFP. Petit jet diastolique central d’insuffisance aortique. Coupe ‘5 cavités’ en ciné FISP (TE 5 ms) laissant apparaitre un jet plus marqué d’insuffisance aortique. Coupe parasternale grand axe en ciné SSFP, avec jet diastolique d’IA excentré contre la grande valve mitrale.

Coupes frontale, parasternale grand axe et sur le plan de la valve aortique chez un patient présentant une maladie aortique associant sténose et insuffisance valvulaire. Trois feuillets valvulaires sont présents (pas de bicuspidie), mais leurs bords libres sont épaissis et leur ampliation d’ouverture est très limitée. On note un jet de perte de signal dans l’aorte ascendante en systole et un jet de régurgitant dans le VG en diastole.

Péricarde/Epanchements

Les épanchements péricardiques correspondent à la présence anormale de plus de 30 à 50 ml de liquide dans la cavité péricardique. Ils peuvent correspondre à de multiples causes (défaillance cardiaque, infection, processus tumoraux, insuffisance rénale, traumatismes…).

La collection liquidienne apparaît principalement derrière le ventricule gauche, dans les recessus péricardiques supérieurs et devant les cavités droites. La répartition peut être très asymétrique, voire cloisonnée ou circonférentielle.

Typiquement, les collections liquidiennes non hémorragiques apparaissent en hyposignal sur les séquences d’écho de spin pondérées T1 et en hypersignal sur les séquences en écho de gradient, comme le rappelle le tableau ci-dessous.

ES T1 ciné (GRE, SSFP)
Epanchement hyposignal hypersignal
Hémorragie hétérogène hétérogène
Epaississement hyposignal hyposignal

ASPECT TYPIQUE

Image:epanchement_es.jpg
Echo de spin pondéré T1 : épanchement en HYPOSIGNAL devant le ventricule droit Même patient en ciné SSFP : épanchement en HYPERSIGNAL signant la nature liquidienne du décollement péricardique (contrairement à l’aspect en hyposignal qui serait observé s’il s’agissait ici d’un épaississement fibreux ou calcifié du péricarde)

L’aspect de l’épanchement durant le cycle cardiaque et l’estimation de sa sévérite sont traités dans les pages suivantes.

Péricarde/Myo-péricardite

MYOPERICARDITE

L’imagerie T1 post-gadolinium peut révéler l’extension des foyers d’hypersignal péricardique aux couches sous épicardiques du myocarde, signant alors une myocardite associée à la péricardite (moins d’un tiers des cas de myocardite).

Image:Myocardite2.jpg Myopéricardite inférieure et latérale basse (flèches). Noter ici les indentations en hypersignal dans les couches externes du myocarde, surtout visible sur la coupe sagittale oblique en inférieur distal et en inféro-basal.
Cine SSFP en coupes 4 cavités et petit axe obtenu chez le même patient que l’image ci-dessus. Les foyers d’hypersignal pathologique sont reconnaissables, surtout en systole.

On remarque que le contraste T1 offert par les séquences ciné SSFP est souvent suffisant pour identifier les foyers d’hypersignal pathologique permettant de distinguer les lésions péricardiques et myocardiques presque aussi bien que les séquences d’inversion-récupération pondérées T1 (cf: le ciné SSFP est la méthode d’imagerie efficace et versatile ‘à tout faire’)

Image:kirchgerner_fl.jpg
Myopéricardite multiloculaire avec multiples zones d’hypersignal post-gadolinium ‘tigrées’, à prédominance sous épicardique et épaississement péricardique en hypersignal inféro-latéral (flèches). Noter que malgré les lésions tissulaires multiples il n’y a pas d’hypokinésie segmentaire nette.

Exemple de myocardite avec petit épanchement péricardique

Image:ly_myo_per_fl.jpg

Examen réalisé chez un patient de 58 ans, aux antécédents de transplantation hépatique 10 ans auparavant, ayant présenté un arrêt cardio-circulatoire sur fibrillation ventriculaire. La coronarographie était normale. Examen IRM difficile réalisé en respiration libre chez un patient confus et agité avec abondantes ESV. L’imagerie de rehaussement tardif après injection de gadolinium révèle la présence d’un petit épanchement péricardique (flèche verte) et surtout d’un foyer d’hypersignal de la paroi latérale du VG, en forme de virgule à point de départ sous épicardique (flèche rouge). Noter l’intérêt des séquences PSIR (3 images de droite) qui permettent de bien discriminer le foyer d’inflammation tissulaire comparativement à l’hypersignal liquidien, alors que l’image en écho de gradient (à gauche) montre un hypersignal similaire pour ces deux pathologies.

Bicuspidie

La bicuspidie est fréquemment méconnue

La bicuspidie correspond à la présence de 2 valvules aortiques au lieu de 3. Il s’agit d’une affection congénitale autosomique dominante à pénétrance variable relativement fréquente, touchant 0,9 à 1,4% de la population (avec une nette prédominance masculine). Cette pathologie entraine deux sortes de complications :

1) des lésions valvulaires à type de sténose et/ou de régurgitation aortique (les sténoses prédominantes sont un peu plus fréquentes que les fuites prédominantes mais ces défauts sont souvent associés).

2) des lésions aortiques avec risque d’évolution anévrysmale ou de dissection aortique. Cette affection constitue en effet autant une maladie de l’aorte que de la valve elle-même et ceci correspond vraisemblablement à l’atteinte de gènes ayant un rôle dans la synthèse des protéines élastiques de la média (fibrilline). En cas de bicuspidie la morphologie de l’aorte initiale est modifiée : elle apparait tubulaire, avec disparition de l’aspect évasé des sinus de Valsalva et effacement du raccordement caractéristique à la jonction sino-tubulaire . Les critères d’intervention en cas d’anévrysme de la racine aortique sont plus précoces en cas de bicuspidie (>50mm) qu’en l’absence de bicuspidie (>55 mm).

Cette affection entraine des conséquences majeures car un nombre important de patients atteint de bicuspidie nécessiteront une intervention sur la valve aortique ou sur l’aorte et – inversement – près de 50% des patients opérés de valvulopathie aortique avant 60 ans présentent une bicuspidie. La recherche d’une bicuspidie est donc une étape important de l’examen de la valve aortique et ce diagnostic n’est pas toujours aisée en échographie.

Les cinés ci-contre illustrent l’aspect échographique de la valve aortique chez un sujet normal (valve comportant 3 feuillets – à gauche) et en cas de bicuspidie (à droite).Le diagnostic de bicuspidie reste incertain en échographie dans 25% des cas (chez l’adulte). Une bonne visualisation de la valve nécessite de respecter scrupuleusement l’orientation en double obliquité indiquée précédemment, en répétant plusieurs acquisitions successives, légèrement décalées de bas en haut, pour se positionner au mieux sur le plan valvulaire. Une difficulté supplémentaire provient du fait que ce plan valvulaire présente des mouvements systolo-diastoliques non négligeables.

Dans sa forme la plus caricaturale, l’aspect IRM de la bicuspidie est caractéristique avec ouverture elliptique, en ‘bouche de poisson’, et non pas en triangle comme dans le cas d’une valve normale avec 3 sigmoïdes s’ouvrant harmonieusement.

Les travaux de Sievers 2007 [1] ont cependant montré que cette variété ‘caricaturale’, sans raphé, est très minoritaire puisqu’elle ne constitue que 6 à 7% des cas. La forme commune de bicuspidie (fortement sous-estimée jusque récemment) comporte un raphé entre 2 sigmoides, de sorte qu’on retrouve un aspect en étoile Mercedes en diastole, trompeur, laissant faussement croire à une valve normale. C’est en systole que se fait le diagnostic, en montrant une ouverture en ellipse asymétrique ou en triangle tronqué. Le terme de ‘pseudo-bicuspidie’ était employé à l’époque pour désigner cette situation mais il ne doit plus être utilisé. La classification de Sievers, basée sur le nombre de raphés, leur topographie et la fonction valvulaire permet de catégoriser les différents types de bicuspidie. La forme la plus commune, constituant 88% des cas, comporte un raphé entre les sigmoides coronaires droite et gauche, avec sténose valvulaire prédominante.

Un important travail de Roberts en 2005 [2] mené chez 932 patients opérés pour sténose aortique (± régurgitation aortique), a montré que plus de la moitié des valves aortiques opérées (59% chez le hommes et 46% chez les femmes) présentaient une malformation congénitale (bicuspidie en général et rarement unicuspidie).

Aspect normal (3 cusps) Biscupidie simple (rare) Bicuspidie avec raphé (fréquent)
Image:bicuspu_nl_244.jpg Image:bicuspu_bicusp_244.jpg Image:bicuspu_pseudol_244.jpg
Aspect normal avec en diastole les 3 branches de l’étoiles Mercedes et en systole une ouverture en triangle. Ouverture systolique en ellipse ou en bouche de poisson, correspondant à une forme rare de bicuspidie,sans raphé. Forme habituelle de bicuspidie avec raphé entrainant un aspect trompeur en diastole (étoile Mercedes) et une ouverture systolique en triangle tronqué.

Le diagnostic doit donc se faire sur l’aspect de la valve en systole. La fusion des cusps droite et gauche est la plus fréquente, suivie de la fusion entre cusp non coronaire et cusp droite. On s’aide également des coupes perpendiculaires au plan de la valve montrant une ouverture ‘en dôme’ et des séquences de flux (cf: exemple de sténoses aortiques sur bicuspidie, page suivante).

Image:ao_mercedes.jpg
Valve aortique normale comportant 3 feuillets donnant l’aspect typique d’étoile Mercedes (à gauche), ce qui peut-être trompeur et surtout l’aspect triangulaire en systole, traduisant l’absence de fusion entre les cusps. Valve aortique bicuspide en ciné SSFP. L’image module est à gauche et l’image de phase (vitesse) est à droite, confirmant l’ouverture systolique elliptique, en ‘bouche de poisson’, signant la bicsupidie.
Image:bicu_tub_systole.jpg Image:bicu_tub_schema_183.jpg La présence d’un raphé comissural entre les deux sigmoides coronaires – souvent calcifié comme sur l’exemple ci-contre – est la forme la plus fréquente de bicuspidie, à ne pas méconnaitre, dont le diagnostic ne peut se faire qu’en systole (cf: un aspect trompeur en diastole).

Enfin, l’évaluation de l’atteinte valvulaire (gradient systolique, fraction de régurgitation éventuels) et le bilan de l’aorte ascendante sont impératifs en cas de bicuspidie, ainsi que la recherche d’une coarctation de l’isthme aortique.

50% des patients opérés de la valve aortique présentent une bicuspidieLa bicuspidie est une véritable maladie de l’aorte (anévrysme)

Le diagnostic de bicuspidie doit se faire en systole (triangle tronqué, bouche de poisson) et non pas en diastole.

Inflammation péricardique

L’inflammation péricardique peut résulter de multiples causes comportant la péricardite virale commune, le rhumatisme articulaire, la polyarthrite rhumatoide, la sarcoïdose, d’autres maladies de système en phase évolutive, les conséquences d’une irradiation thoracique… En théorie, un aspect hyperintense des feuillets péricardiques sur les séquences pondérées T2 pourrait révéler la présence de tissu inflammatoire oedématié. Cependant, la qualité technique des images T2 est parfois médiocre ; raison pour laquelle il est plus aisé de rechercher les signes inflammatoires avec des séquences pondérées T1 après injection de gadolinium.

Il importe d’insister ici sur l’apport singulier de l’IRM avec gadolinium pour objectiver l’inflammation des feuillets péricardiques (et éventuellement également du myocarde sous épicardique en cas de myopéricardite) car aucune autre technique d’imagerie ne permet de réaliser ces diagnostics aussi clairement (sauf le scanner qui offre un moins bon contraste tissulaire et qui est moins usité dans ces indications).

PERICARDITE SÈCHE

En l’absence d’épanchement, le diagnostic IRM n’est pas réalisable sans injection de gadolinium. En séquence pondérée T1, une légère prise de contraste péricardique homogène est habituelle après injection de gadolinium mais un hypersignal péricardique marqué avec épaississement péricardique signe la péricardite, comme on peut le voir sur l’exemple ci-dessous.

Image:Myocardite1.jpg Coupes verticale grand axe (A) et petit axe (B) réalisées en séquence d’inversion-récupération pondérée T1, 10 minutes apres injection de gadolinium.Un épaississement péricardique focal en hypersignal intense est visible sous la paroi inférieure du ventricule gauche, traduisant l’inflammation localisée dans ce cas de péricardite sèche

Autre exemple de péricardite sèche :

Image:peric_hist_vga_le.jpg

Aspect épaissi ‘trop bien visible’ de l’ensemble des feuillets péricardiques, en hypersignal intense sur les séquences de rehaussement tardif post-gadolinium (flèches), traduisant une péricardite sans épanchement liquidien associé chez un patient de 64 ans. Noter sur la séquence ciné (à gauche) des plages en hyposignal hétérogène, cernées par les lignes en hypersignal correspondant aux feuillets péricardiques viscéral et pariétal, en rapport avec des franges graisseuses épicardiques. Noter également un hypersignal pulmonaire correspondant à une scissurite (flèche verte).

PERICARDITE AVEC ÉPANCHEMENT

En cas d’épanchement péricardique, une prise de contraste marquée du feuillet pariétal et du feuillet viscéral du péricarde indique un état inflammatoire (qui n’est pas obligatoire, par exemple dans l’épanchement chronique d’un myxoedème) – cf : voir par exemple Francone 2005 [1].

Image:mechetta_183_.jpg Image:rouffi_psir.jpg
Epanchement péricardique chronique sans caractère inflammatoire. Absence de prise de contraste des feuillets péricardiques sur l’imagerie T1 après injection de gadolinium (flèches rouges) Epanchement péricardique inflammatoire attesté par l’hypersignal des feuillets péricardiques entourant l’épanchement (en hyposignal) sur cette coupe pondérée T1 (PSIR) post-gadolinium (flèches).

Péricarde/Aspect en IRM

Le péricarde normal apparait comme une fine ligne en trait de crayon de moins de 2 mm d’épaisseur, surtout visible devant le ventricule droite et le sillon tricuspidien, plus inconstamment visible derrière le ventricule gauche. Il est surligné par les structures graisseuses qui l’enserrent en sandwich : franges épicardiques en dedans et graisse paracardiaque en dehors.

Image:Netter1_h300.jpg Image:peri_nl_h300.jpg
Extrait de The Netter Collection of Medical Illustrations – Heart [1] Aspect normal du péricarde en écho de spin axial pondéré T1 (flèches rouges)
< Image:liseré_péricardique.jpg Le liseré péricardique normal est surtout bien identifiable lorsque les franges graisseuses qui l’entourent sont proéminentes et continues, ce qui est souvent le cas devant les cavités droites dans les parties basses du massif cardiaque comme on peut le voir sur cet exemple (flèches blanches). Noter l’artère coronaire droite (flèche noire).

SEMEIOLOGIE DE BASE DES ATTEINTES PERICARDIQUES

En IRM, l’aspect du péricarde est très différent en cas d’épanchement liquidien ou en cas d’épaississement fibreux ou calcifié. Le tableau ci-dessous résume l’aspect du signal en fonction des deux principales séquences utilisées en cardiologie, à savoir Turbo-spin écho pondéré T1 (ou Haste) et ciné en écho de gradient (ou SSFP)

ES T1 ciné (GRE, SSFP)
Epanchement hyposignal hypersignal
Hémorragie hétérogène hétérogène
Epaississement hyposignal hyposignal

Des exemples sont présentés dans les sections suivantes de ce chapitre