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Valvulopathies/Insuffisances mitrales

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APPRÉCIATION VISUELLE (QUALITATIVE)

L’insuffisance mitrale correspond à un reflux de sang du VG vers l’OG en systole en raison d’un défaut de continence de la valve mitrale.

Quoique moins précis que l’échocardiographie, l’IRM peut apporter des indices sur le mécanisme de la fuite valvulaire. Par exemple, un jet très excentré signent volontiers un prolapsus mitral.

Les étiologies sont dystrophiques (valve myxoide, prolapsus, rupture de cordages), dégénératives (remaniement fibro-calcifié des sujets agés), rhumatismales, ischémiques (rupture de pilier aigue et surtout remodelage VG chronique conduisant à une restriction à la fermeture valvulaire), sur endocardite (végétations), liées à une dilatation du VG (cardiomyopathies dilatées) ou à une cardiomyopathie hypertrophique (± obstructive).

Le signe direct d’une insuffisance mitrale repose sur le jet de perte de signal systolique dans l’oreillette gauche en ciné.

Cine SSFP en incidence 4 cavités et verticale grand axe, montrant un jet systolique central de perte de signal dans l’oreillette gauche signant une fuite mitrale. IM avec jet de perte de signal proto- systolique modeste mais oreillette gauche dilatée et épanchement pleural droit.

La chronologie et la topographie du jet régurgitant peuvent être des indices intéressants, sachant que les fuites sévères sont plus prolongées que les petites IM protosystoliques.

Jet central de fuite mitrale fonctionnelle chez un patient avec cardiomyopathie dilatée hypokinétique. Fuite mitrale post-infarctus avec hypokinésie apicale. Fuite mitrale par dysfonction de pilier sur IDM inférieur.

Indicateur qualitatif et non pas quantitatif. Nous avons vu précédemment que l’étendue de la zone de perte de signal liée à une fuite valvulaire dépend du type de séquence ciné utilisée et du temps d’écho TE (aspect prononcé en écho de gradient ‘classique’ à TE long et aspect réduit en ciné SSFP à TE très court). Par conséquent, 1) on ne peut exclure une petite fuite mitrale en l’absence de jet de perte de signal en ciné SSFP, d’autant que le plan de coupe peut passer à coté du jet régurgitant et 2) l’extension du jet de perte de signal n’est qu’un indicateur très grossier de l’importance de la fuite, qui n’a de valeur que si l’on connait bien la séméiologie produite par l’appareil avec lequel on a l’habitude de travailler.

Les signes indirects classiques de gravité d’une insuffisance mitrale sont plus pertinents : dilatation de l’oreillette gauche (diamètre antéro-postérieur > 40 ou 45 mm), dilatation du ventricule gauche (VG > 55 mm en 4 cavité ou > 60 mm en incidence verticale grand axe). Enfin, l’analyse morphologique des valves est de valeur très limitée en IRM par rapport aux données accessibles en échocardiographie.

Valves/Méthodes IRM pour les valves

ECHO DE SPIN : MORPHOLOGIE

Les séquences en écho de spin produisent des images statiques ‘sang noir’ qui permettent une bonne analyse morphologique cardiaque. Il s’agit principalement des séquences turbo (une à 2 images par apnée avec bonne résolution spatiale) et Haste (une image à chaque battement cardiaque avec une résolution spatiale réduite).

Image:ES_EG_schoen.jpg Patiente présentant une maladie mitrale sévère avec oreillette gauche très dilatée.A : Image en (turbo) spin écho

B : même plan de coupe en écho de gradient (extrait d’une série ciné SSFP).

Les contrastes sont inversés entre ces deux séquences avec un aspect du pool sanguin en noir en écho de spin, tandis qu’il apparait en hypersignal (blanc) en écho de gradient (ciné).

Image:ES_CX_MAE.jpg Echo de spin (à gauche ) et cine-IRM (à droite), dont les contrastes sont inversés, sont complémentaires pour l’étude des structures anatomiques et des lésions valvulaires.Exemple de patient présentant une maladie annulo-ectasiante avec dilatation des sinus de Valsalva vers 50 mm et petite insuffisance aortique associée.

Les deux principales difficultés rencontrées dans l’étude des valves par IRM sont la finesse des structures valvulaires et la grande mobilité des feuillets valvulaires qui limitent la précision de l’imagerie. Par exemple, la recherche de végétations endocarditiques (très mobiles) n’est pas une bonne indication pour l’IRM cardiaque. En pratique, l’imagerie en écho de spin est moins utilisée que le ciné pour l’étude des valves.

CINE EN ECHO DE GRADIENT ‘CLASSIQUE’ : JETS VALVULAIRES

Les ancienne séquences de ciné-IRM en écho de gradient utilisaient des temps d’écho longs (TE 12 ms), en raison de la relative faiblesse des gradients de champs magnétiques qui étaient disponible aux alentours de 1990. Ces séquences d’écho de gradient (en respiration libre puis segmentées, en apnée) n’offraient pas une bonne qualité d’image. Le rapport signal/bruit était médiocre et les interfaces sang-myocarde étaient relativement flous. Cependant une intéressante séméiologie liée aux flux sanguins rapide était obtenue avec ces séquences à TE long. En effet, les spins en mouvement subissent un déphasage proportionnel au temps TE. Cette dispersion de phase des spins au sein même de chaque voxel où le flux sanguin est rapide entraine une perte de signal. Une signature des jets rapide est ainsi disponible sous forme de lignes de perte de signal (trainées noires), ce qui peut-etre comparé à l’extension des jets couleurs en échographie doppler couleur [1].

Image:GRE_signal_void.jpg Image:IA_IM.jpg
Insuffisance mitrale. Insuffisance aortique et fuite mitrale.

Avec ces séquences, les jets physiologiques (< 1m/s) n’entrainent pas de perte de signal mais les sténoses ou les fuites valvulaires (accélérant le flux jusqu’à plus de 5 m/s et créant des turbulences) apparaissent sous forme de zones de perte de signal (flèches rouges).

Ces plages de perte de signal révèlent bien les désordres hémodynamiques et offrent une cartographie qualitative intéressante (mais sans possibilité de quantification) des valvulopathies.

Exemples des jets pathologiques de perte de signal (ciné TE 12 ms) :

Insuffisances aortique et mitrale Fuites ao. et tricuspidienne Insuffisance tricuspidienne Sténose valvulaire aortique

L’effet de perte de signal s’accentue avec l’allongement du TE

Image:CIV_selon_TE.jpg Images systoliques, obtenues à des instants identiques du cycle, en écho de gradient ciné avec des TE distincts, chez une patiente avec petite communication interventriculaire. Le jet de perte de signal infundibulaire lié au shunt est plus étendue avec le TE long.

CINE SSFP : QUALITE OPTIMALE MAIS JETS MAL VISIBLES

Image:IAo_selon_TE_.jpg
Images diastoliques obtenues chez deux patients présentant des fuites aortique de gravité similaire (grade 2). En A : GRE avec TE 12 ms et en B : SSFP avec TE très court à 1.6 ms. Echo de gradient classique à TE long (TE 12 ms) laissant apparaitre une large perte de signal diastolique dans le VG. Cine SSFP à TE court (TE 1.6 ms) avec jet de perte de signal modeste quoique la fuite aortique soit similaire à celle de la figure précédente.

En pratique, les séquences ciné en écho de gradient sont désormais toujours pratiquée en SSFP car la qualité d’image est très supérieure à celle offerte par le ciné en écho de gradient ‘classique’. Ainsi, la séméiologie de perte de signal n’est elle plus aussi nettement apparente.

Nous verrons cependant que d’autres méthodes d’estimation et de quantification des fuites et des sténoses valvulaires pourront être utilisées. Il s’agit d’une part de la volumétrie des cavités cardiaques permettant de calculer les volumes éjectés par les ventricules droit et gauche (voir chapitre sur la fonction VG) et d’autre part de la fluximétrie avec les séquences de cartographie des vitesses, explicitée page suivante.

Valvulopathies/Plans de coupe

Les principaux plans de coupe utilisés en IRM pour l’étude des valves sont représentés ici. On utilise en pratique surtout des incidences qui sont perpendiculaires au plan de la valve (et qui ne visualisent donc qu’une petite portion des valves) car les incidences alignées sur le plan valvulaire sont affectées par d’importants effets d’entrée et de sortie de coupe étant donné que les anneaux valvulaires sont mobiles (surtout les valves auriculo-ventriculaires dont le déplacement est ample).

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VALVE MITRALE

Image:repere_vga.jpg Image:repere_mit_4c.jpg
A partir d’une coupe axiale médio-ventriculaire, un plan de coupe sagittal oblique est sélectionné (ligne oblique rouge sur l’image de gauche). Sur la coupe ciné ‘verticale grand axe’ ainsi obtenu apparaissent la grande valve mitrale (en haut) et la petite valve mitrale (en bas). Noter ici les cordages reliant la grande valve au pilier inférieur. La coupe verticale grand axe précédente sert de repère pour sélectionner un plan horizontal oblique (ligne rouge sur l’image de gauche), qui conduit au ciné en incidence ‘4 cavités’ où l’on voit la grande valve mitrale sur le versant septal et la petite valve mitrale sur le versant latéral (et la tricuspide du coté droit).

Incidence en double obliquité sur le plan valvulaire mitral :

Image:double_oblique_mi.jpg Imagerie ciné dans le plan de la valve mitrale, correspondant à l’orientation en double obliquité indiquée sur la figure de gauche.Les 2 valves s’ouvrent symétriquement de manière harmonieuse et ample.

L’imagerie orientée dans le plan valvulaire trouve deux limites importantes : 1) le plan valvulaire se déplace durant le cycle cardiaque. En systole le plan mitral présente une excursion vers le bas de l’odre de 13 mm en moyenne (soit deux fois plus que l’épaisseur de coupe elle-même !). Ainsi, avec les repères présentés ci dessus, les feuillets mitraux sont imagés en diastole tandis que c’est l’anneau valvulaire (voire même l’oreillette gauche) qui risque d’être pris en systole. Ce phénomène de sortie de coupe est perturbateur, notamment pour les mesures de flux mitral. 2) en outre, un deuxième problème concerne l’imprécision générée par les apnées successives du patient pour chaque séquence ciné. Selon que l’apnée s’effectue avec un remplissage pulmonaire plus ou moins fluctuant, le plan de coupe effectif risque d’être décalé par rapport aux orientations qui ont été définies sur les coupes de repérage.

VALVE AORTIQUE

Image:repere_ao_cx.jpg Image:repere_ao_psga.jpg
A partir d’un repère axial, un plan de coupe frontal (ligne rouge sur l’image de gauche) permet d’obtenir une incidence qui enfile la valve aortique et la racine aortique, montrant ici les feuillets sigmoïdiens antéro droit et gauche. Cette coupe, montrant bien les rapports entre VG et aorte, permet d’apprécier une éventuelle fuite aortique. Une orientation sagittale oblique prescrite sur la coupe frontale précédente (flèche rouge sur l’image de gauche) conduit à l’orientation ‘parasternale grand axe’ similaire à celle que l’on réalise en échocardiographie transthoracique en routine. La chambre d’éjection du VG est bien déroulée sur cette incidence.

Incidence en double obliquité sur le plan valvulaire aortique :

Image:double_oblique_ao.jpg Coupe en double obliquité, selon les repères représentés sur la figure de gauche, montrant la valve aortique avec ses trois feuillets normaux délimitant les sinus de Valsalva antéro-droit, antéro-gauche et postérieur non coronaire.Noter l’aspect caractéristique en étoile Mercedes correspondant à l’affrontement des sigmoides en diastole et l’ouverture typique en triangle en systole dont l’identification est indispensable pour affirmer qu’il n’y a pas de bicuspidie.

Les même limites que celles évoquées pour l’imagerie du plan valvulaire mitral s’appliquent ici (quoique l’excursion cyclique du plan valvulaire aortique est moindre que le déplacement du plan mitral).

VALVE TRICUSPIDE

Image:repere_vd_gd_axe.jpg Image:repere_tric_4c.jpg

L’approche de la valve tricuspide est comparable à celle de la valve mitrale. Les orientations privilégiées sont : l’incidence verticale grand axe, sagittale oblique, enfilant l’axe OD-apex ventriculaire droit (illustré à gauche) et l’incidence qui lui est perpendiculaire : 4 cavités passant par le milieu de la tricuspide (ici à droite).

VALVE PULMONAIRE

Image:repere_ap_sz.jpg Image:repere_pu_cx.jpg
Image:valv_pulmo_es.jpg L’étude de la valve pulmonaire s’effectue en sélectionnant :1) une incidence sagittale passant par le tronc de l’artère pulmonaire. Cette vue est intéressante car elle déroule l’infundibulum, la valve et le tronc pulmonaire.

2) à partir de cette coupe sagittale, l’incidence perpendiculaire, frontale oblique, complète l’analyse de la valve pulmonaire et permet notamment de rechercher des jets pathologiques de sténose ou de fuite valvulaire ainsi qu’une obstruction sous valvulaire ou dans le tronc de l’AP.

Ces vues sont généralement difficiles à obtenir en échographie chez l’adulte, ce qui constitue un des intérêt de l’IRM dans ce domaine.

 

Valvulopathies/Les valves cardiaques

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ANATOMIE

On distingue quatres appareils valvulaires destinés à maintenir un flux antégrade unidirectionnel, sans reflux dans les circuits droit et gauche.

Image:Netter_valves2.jpg Image:Netter_valves3.jpg Image:Netter_valves4.jpg
Coupe transverse laissant apparaitre les quatre appareils valvulaires. Vue antérieure sur le VD ouvert montrant les 3 feuillets de la valve tricuspide.’ Vue latérale sur le VG ouvert, montrant les deux feuillets de la valve mitrale.

Illustrations extraites de The Netter Collection [1]

Dans le coeur droit, la valve auriculo-ventriculaire tricuspide comporte 3 feuillets (septal, antérieur et inférieur). La valve pulmonaire comporte 3 feuillets sigmoides.

Dans le coeur gauche, la valve auriculo-ventriculaire mitrale comporte 2 feuillet (antérieur ou grande valve et postérieur ou petite valve). La valve aortique comporte 3 feuillets sigmoidiens disposés en nid d’hirondelle à la partie basse des sinus de Valsalva : le sinus antéro-droit d’où émerge l’ostium de la coronaire droite, le sinus de Valsalva antéro-gauche d’où nait d’ostium de la coronaire gauche et en arrière le sinus de Valsalva non coronaire.

Identifications des valves auriculo-ventriculaires

Il est important de bien identifier les valves mitrale et tricuspide (définissant ainsi quel ventricule se trouve en dessous puisque la valve mitrale communique toujours avec un ventricule anatomiquement gauche et la valve tricuspide communique toujours avec un ventricule anatomiquement droit).

L’insertion septale de la valve MITRALE, communiquant avec le ventricule gauche, est toujours située EN ARRIERE de l’insertion septale de la valve tricuspide qui communique avec le ventricule droit.Ceci permet de distinguer l’anatomie normale (mitrale et VG à gauche), d’avec la transposition corrigée des gros vaisseaux où il existe une inversion ventriculaire associée à la transposition des gros vaisseaux. Image:mi_tri_nl_avan.jpg Image:Tcgv_boe_fleches.jpg
Disposition normale. Mitrale en arrière (flèche rouge), tricuspide en avant. Transposition corrigée des gros Vx. Valves auriculo-ventriculaires inversées.

PATHOLOGIES VALVULAIRES

Les fuites mitrales et les sténoses aortiques représentent les principales valvulopathies rencontrées en pratique courante chez l’adulte.

Image:Importance_valvulopathies.jpg Le rétrécissement mitral est devenu rare et s’observe principalement chez des patients originaires des pays africains où sévit encore le RAA.Une petite fuite tricuspide physiologique est habituellement retrouvée en échographie, même chez les sujets sains, et présente l’avantage de pouvoir quantifier les pressions pulmonaires. Les lésions tricuspidiennes organiques sont rares (par exemple : carcinoïde, maladie d’Ebstein). Les lésions de la valve pulmonaire s’inscrivent généralement dans le cadre de cardiopathies congénitales.

Il est habituel en échographie de déceler une micro-fuite mitrale, quasi physiologique chez une majorité de patients. Les insuffisances mitrales modérées sont très banales, souvent découvertes en échographie chez des patients asymptomatiques. La plupart des IM actuelles sont fibro-dégénératives, volontiers calcifiées chez le sujet agé. Dans les formes dystrophiques avec excès tissulaire et élongation des cordages, on observe typiquement un remaniement myxoïde, une ballonisation, voire un prolapsus valvulaire (intéressant surtout la petite valve). Les autres étiologies sont moins fréquentes : IM rhumatismales (scléro-atrophiques cicatricielles), oslériennes sur endocardite (avec végétations, graves et rapides), ischémiques (anomalie de contraction segmentaire ou lésion de pilier post-infarctus).

La sténose aortique par dégénérescence fibro-calcifiée -longtemps asymptomatique – est fréquente chez le sujet agée, pouvant comporter une part d’insuffisance valvulaire asociée. La bicuspidie aortique est une étiologie importante pour ces atteintes valvulaires aortiques, favorisant également l’anévrysme dystrophique de la racine aortique ou maladie annulo-ectasiante (typiquement sur maladie de Marfan ou d’Ehler Danlos). Endocardite infectieuse, RAA, syphilis sont devenues des causes moins fréquentes de fuite aortique.

METHODES DIAGNOSTIQUES

L’auscultation (souffle) est la première méthode d’exploration des valvulopathies. Historiquement, l’ECG (hypertrophie, troubles du rythme), la radiographie du thorax (silhouette cardiaque et vascularisation pulmonaire) et le cathéterisme (débit par la méthode de Fick, gradients de pression, grade de sévérité angiographique selon Sellers) constituaient les examens complémentaires des valvulopathies.

Radioscopie et ventriculographie de contraste

La radioscopie (fluoroscopie) permet de bien visualiser les calcifications valvulaires ou péricardiques (sans injection de produit de contraste iodé) et d’apprécier la cinétique des prothèses valvulaires mécaniques (défaut d’ampliation ou de fermeture de billes, de disque ou d’ailettes des prothèses valvulaires).

La ventriculographie ou l’aortographie (avec injection iodée) permet d’estimer les jets régurgitants (fuites aortiques et mitrales) dont la sévérité est cotée selon la classification de Sellers

Incidence OAD montrant des calcifications mitrales importantes, sans fuite valvulaire nette. Incidence OAD – Fuite mitrale estimée 2/4 selon Sellers. Incidence OAD sans injection iodée, montrant la cinétique normale d’une valve de Starr mitrale et d’une valve de Bjork aortique.

Rôle central de l’échocardiographie

L’échocardiographie est actuellement LA méthode diagnostique centrale dans les valvulopathies en raison de ses bonnes performances, de son immédiateté de mise en oeuvre, au lit du malade et de son cout modique. Outre la bonne analyse des cavités cardiaques, de la cinétique de contraction et de la morphologie valvulaire, le doppler couleur permet de cartographier les jets régurgitants et le doppler continu permet de quantifier fiablement les sténoses.

Incidence 4 cavités montrant un jet central de fuite mitrale moyennement important (et une petite fuite aortique). Incidence parasternale grand axe montrant un jet diastolique de régurgitation aortique. Incidence 4 cavités montrant un jet excentré de fuite tricuspide modérée se réfléchissant contre la cloison interauriculaire hypertrophiée.

L’échographie doit 1) identifier l’atteinte valvulaire, 2) en analysant les feuillets valvulaires, préciser le mécanisme de la lésion (dégénératif, dystrophique…), 3) apprécier le retentissement sur les cavités cardiaques (dilatation) et 4) quantifier les lésions valvulaires (fuite ou sténose).

Les limites de l’échographie sont dominées par l’étroitesse ou la médiocrité des fenêtres d’échogénicités chez certains patients obèses ou broncho-emphysémateux notamment. En cas de difficulté sur des petites structures mobiles (végétations valvulaires par exemple), l’échographie trans-oesophagienne constitue l’étape supplémentaire qui permet en pratique de répondre à la plupart des questions diagnostiques.

ROLE DE L’IRM DANS LES VALVULOPATHIES

Compte tenu de l’efficacité des explorations échocardiographiques, il reste peu de place pour l’IRM dans le domaine des valvulopathies. Nous verrons cependant que les outils IRM de quantification des flux (cartographie des vitesses) peut constituer une aide intéressante pour préciser l’importance des régurgitations aortiques et pulmonaires qui ne sont pas toujours faciles à quantifier en échographie. L’IRM est également intéressante pour étudier la racine aortique dans les maladies annulo-ectasiantes et pour visualiser les lésions périvalvulairs (abcès annulaires).

Tagging

Image:Tag_design.jpg
Chapitre rédigé avec le concours du Dr Pierre Croisille, Laboratoire Creatis-LRMN, UMR CNRS 5220 & INSERM U630, Hôpital Cardiologique L.Pradel, Lyon

Le tagging (ou tatouage) myocardique permet, comme le speckle tracking en échographie, de mesurer les déformations myocardiques dans toutes les directions. D’importants progrès dans les séquences d’imagerie et dans le post-traitement ont rendu cette technique accessible. Il en résulte une séméiologie nouvelle décrite dans ce chapitre. L’intérêt principal des multiples indices dérivés du tagging est d’apporter des nouveaux marqueurs de dysfonction contractile, plus précoces que les paramètres fonctionnels usuels, avant que les anomalies ne deviennent perceptibles visuellement.

Concept

Le concept de tagging (que l’on peut traduire par marquage ou tatouage) a été introduit en 1988 par Zerhouni [1] et Axel [2]. Il s’agit d’appliquer des lignes ou des grilles de saturation dans le plan de coupe au moment où survient l’onde R de l’ECG (fin de la diastole mécanique), afin de pouvoir suivre la déformation de ces lignes (d’hyposignal) en systole lors de la contraction cardiaque. La persistance des motifs de tagging durant les 20 à 40 images décrivant le cycle cardiaque (résolution temporelle de l’ordre de 30 ms) permet de quantifier les déplacement myocardiques liés à la contraction et à la relaxation.

Image:sequence_tagging_730.jpg Une grille de lignes noires est appliquée sur l’image au moment du complexe QRS (image de gauche). Les images successives de la séquence ciné ensuite obtenues (toutes les 30 ms environ) montrent la déformation progressives de ces marques, en rapport avec la contraction cardiaque. En coupe petit axe on observe une incurvation centripète des lignes en systole (vers le centre de la cavité VG). En diastole, lors du retour à la position initiale on note une certaine atténuation du contraste par effacement des tags lié au T1 myocardique (fading).

Plusieurs types de séquences peuvent être utilisées pour l’application des lignes de tag (SPAMM, Dante). Ces marques d’hyposignal s’estompent progressivement durant le cycle cardiaque (fading), en fonction du temps de relaxation T1 du myocarde. Le T1 du myocarde est de l’ordre de 600 à 700 ms à 1.5 T, il est plus long à haut champ (vers 1000 ms à 3T) de sorte que les images de tagging sont meilleures à 3T. Le T1 est plus court après injection de gadolinium, raison pour laquelle il vaut mieux éviter de faire des études de tagging après injection de gadolinium.

L’analyse visuelle est possible mais l’intérêt principal de la méthode consiste à extraire des paramètres quantitatifs à partir du déplacement des lignes durant le cycle cardiaque. Ce post-traitement peut être réalisé sur l’image elle-même en détectant et en suivant les lignes (tracking) ou par méthode de flux optique qui construit de vecteurs de déplacement. Actuellement, le post-traitement est surtout réalisé de manière automatique (non opérateur dépendante) dans le plan de Fourier avec la méthode HARP (Osman 1999 [3]). Les illustrations présentées ci-dessous ont été obtenues avec le logiciel InTag élaboré par les équipes universitaires de Maastricht et de Lyon (www.creatis.insa-lyon.fr/inTag/ [4]).

Trois composantes géométriques principales du strain (déformation)

L’expression strain correspond à la déformation subie par une partie du myocarde lorsque sa forme change durant le cycle cardiaque. Le strain ou déformation segmentaire, est exprimé en pourcentage de changement de longueur deltaL d’un segment myocardique L dans une direction donnée : strain (%) = DeltaL/L. Le strain est positif en cas d’élongation et négatif en cas de raccourcissement.

Image:Principe_strain.jpg Définition du strain. Les traits rouges et verts indiquent les longueurs diastolique Ld et systolique Ls correspondant à un segment orienté ici de manière radiaire (en rouge, dirigé vers le centre du ventricule gauche) ou circonférentielle (en vert, orienté selon le périmètre du VG. Le strain à cet endroit est (Ls-Ld)/Ld. Il est de l’ordre de 10 à 40%

Plutôt que d’utiliser les ‘vecteurs propres’ du champ de déformation, on préfère se référer aux trois composantes du strain, perpendiculaires (orthogonales) entre elles et correspondant à l’orientation du ventricule gauche (VG)  : longitudinale, étudiée en coupe grand axe, radiale et circonférentielle étudiées en coupes petit axe.
1) Le strain longitudinal, négatif en systole, correspond au rapprochement base-apex.
2) Le strain radial, positif en systole, correspond au déplacement centripète vers le centre de la cavité. Il accompagne l’épaississement systolique pariétal.
3) Le strain circonférentiel, négatif en systole, est tangentiel aux parois dans le plan petit axe. Il traduit le raccourcissement circonférentiel.
Les ordres de grandeur de ces indices sont résumés dans le tableau II

Image:component3.jpg Illustration des 3 types de strain accessibles grâce aux données du tagging.1) selon la direction longitudinale (grand axe), la déformation longitudinale correspond au raccourcissement base-pointe.

Dans le plan petit axe : 2) la déformation circonférentielle est tangente aux parois (le long du périmètre) et 3) la déformation radiale est dirigée vers le centre de la cavité VG.

Les coupes proches de l’apex présentent une rotation horaire (vue depuis l’apex) tandis que les coupes basales présentent une rotation dans le sens anti-horaire (flèches courbes Base et Apex).

Image:circonferentiel.jpg Image:longitudinal.jpg
Les déformations circonférentielles et radiales sont obtenues à partir des coupes petit axe La déformation longitudinale est obtenue à partir des coupes grand axe

Mode de représentation des paramètres de strain

Ces différentes composantes du strain peuvent être représentées sous forme de courbes (évolution selon le temps dans le cycle cardiaque), de vecteurs superposés à l’image anatomique (champ de vecteurs) ou de cartes paramétriques couleur (pour chaque instant du cycle cardiaque), comme l’illustre l’exemple ci-dessous. Il est aussi possible de représenter le déplacement global (à ne pas confondre avec le strain ou déformation).

Image:strain_circonferentiel.jpg Déformation circonférentielle correspondant au mouvement le long du périmètre (tangentiellement aux contours myocardiques) sur une coupe petit axe. L’image de gauche montre une image de tagging en systole. Au milieu est représentée l’image paramétrique du strain circonférentiel ; les teintes bleues correspondent aux déformations les plus importantes. A droite sont représentées les courbes de déformation sur six secteurs myocardiques. On constate que la déformation circonférentielle est plus intense (de l’ordre de -30%) dans les territoires antérieur et latéral. Les couches sous endocardiques présentent une déformation plus forte que les couches sous épicardiques.

L’expression la plus synthétique de ces multiples paramètre, tenant compte des normes régionales, est la représentation en z-score proposée par l’équipe de St Louis (Cupps 2010 [5]) qui consiste a représenter la surface 3D du VG avec une couleur qui exprime l’écart entre le strain composite observé et la norme établie en ce point chez des sujets témoins.

Le strain rate est la dérivée du strain (exprimé en 1/s) et correspond à la vitesse de déformation. Il est comparable à la vitesse d’éjection ou de remplissage décrit en ventriculographie isotopique (en ventriculographie isotopique, les vitesses maximales d’éjection ou de remplissage normales sont > 2.0 VTD/s).

Champ des vecteurs de déplacementUne autre modalité de représentation du mouvement local consiste à dessiner les vecteurs de déplacement instantanés (à chaque instant du cycle cardiaque).

Volumes et fonction VD

L’évaluation de la fonction systolique du VD n’est généralement pas aisée en échographie. A défaut de pouvoir obtenir une véritable fraction d’éjection du VD, une approche quantitative de la fonction contractile du VD consiste à calculer la variation de surface en coupe 4 cavités médio-ventriculaire (right ventricular fractional area change). La valeur normale de cet indice est de 40 à 74%. Cependant de larges portions du VD échappent ainsi à l’analyse (dont l’infundibulum qui compte pour 25% du volume).

L’IRM, au contraire, est un bon outil d’analyse du VD qui peut être découpé en tranches parallèles sans limitation du champ de vue, permettant ainsi de quantifier le volume 3D sans aucune supposition géométrique ou mathématique (méthode des disques de Simpson – comme pour l’étude du VG). Dans quelle incidence faut-il alors découper le VD ?

L’incidence petit axe, comme pour le VG, présente le grand avantage de permettre l’analyse simultanée des ventricules droit et gauche. Dans notre expérience, les difficultés d’entrée et de sortie de coupe au niveau de l’anneau tricuspidien rendent toutefois cette procédure incertaine, de sorte que nous préférons utiliser une pile de coupes axiales strictes, comme nous l’explicitons ci-dessous.

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Difficultés importantes avec l’approche ‘petit axe’

L’étude du VD en coupe petit axe pose des problèmes difficiles à la base du VD, au niveau du plan tricuspidien où il est très difficile d’affirmer si la coupe passe dans le VD ou dans l’OD. Il s’agit du même problème que pour la coupe basale du VG mais, contrairement au VG où il est assez facile de determiner l’épaisseur de la paroi myocardique, il n’est généralement pas possible de savoir avec certitude si la coupe passe devant ou derrière l’anneau tricuspidien comme l’illustre la figure ci-dessous.

Image:Sortie_coupe_VD.jpg La ligne oblique rouge indique la position de la coupe basale petit axe en diastole (en haut) et en systole (en bas). En diastole la coupe passe dans le VD tandis qu’en systole la coupe est nettement localisée dans l’OD. Cette distinction n’est toutefois pas toujours évidente sur les images petit axe et il n’est pas commode de positionner pour chaque instant du cycle cardiaque l’image de référence ‘4 cavités’ correspondant au même instant du cycle afin de savoir où passe exactement la coupe.

Image:Exclusion_basale_VD.jpg Autre exemple montrant – dans la coupe basale – le remplacement de la cavité ventriculaire droite (rouge, à inclure dans la mesure) en diastole par la cavité de l’oreillette droite (jaune, à exclure de la mesure) en systole.
L’amplitude de déplacement de l’anneau tricuspidien, correspondant au TAPSE mesuré en échographie, est de l’ordre de 20 mm, ce qui peut représenter jusqu’à 3 épaisseurs de tranche (vs 13 mm en moyenne pour le déplacement de l’anneau mitral).
C’est pourquoi l’approche petit axe nous parait très incertaine pour la quantification du VD ; même si le contourage des coupes situées en avant est facile.

Exemple de contourage du VD et du VG à partir d’une pile de 8 coupes petit axe :

Volumes (ml) :Ventricule droit :
VTD = 140 ml
VES = 80 ml

Ventricule gauche :
VTD = 124 ml
VES = 89 ml

Flux Aortique = 77 ml

Ces écarts traduisent l’ordre de grandeur de l’imprécision des mesures (env. 20%)

Approche avec une pile de coupes axiales

Le recours aux coupes axiales permet de contourner cette difficulté et offre une excellente identification du plan tricuspidien dont les contours sont ainsi facile à dessiner, en diastole comme en systole. Malheureusement une autre difficulté apparait avec cette méthode : l’effet de volume partiel qui affecte les coupes extrêmes en haut et en bas.

A la partie supérieure, il s’agit de la valve pulmonaire dont l’identification est généralement possible ; en toute hypothèse des erreurs de planimétrie à la jonction avec le tronc de l’artère pulmonaire ne sont pas critiques car elles ne contribuent que de façon marginale à la volumétrie du VD.

A la partie basse, par contre le problème peut être plus difficile car il concerne le plancher du ventricule droit qui entre et qui sort du plan de coupe durant le cycle cardiaque comme le montre la figure ci-dessous. Or l’intensité du signal sanguin dans cette portion du VD est atténuée en raison du ‘mélange’ qui existe avec la paroi inférieure (définition de l’effet de volume partiel). Les contours de cette portion du VD peuvent donc être difficile à ce niveau, ce qui est important car cette contribution segmentaire est significative dans le volume total du VD.

Image:volume_partiel_plancher_vd.jpg

En diastole la coupe basse (lignes pointillées) est dans la cavité VG, en systole, la coupe est en volume partiel avec la paroi myocardique et le contourage de la cavité VD est difficile à réaliser. Le plan tricuspidien reste cependant bien défini à tous les instants du cycle cardiaque

Exemple de volumétrie du VD chez un patient avec infarctus du VD

Image:VD_sing.jpg

Image:Result_VD_sing.jpg Les contours endocardiques du VD sont tracés manuellement sur ces coupes en diastole (ligne du haut) et en systole (ligne du bas).Neuf niveaux de coupe de 10 mm d’épaisseur ont été nécessaires pour couvrir les ventricules droit et gauche.

Seule la coupe la plus basse (N°1, à gauche sur la figure) pose des difficultés de contourage en raison de l’effet de volume partiel au niveau du plancher ventriculaire.

Les ciné et l’imagerie de rehaussement tardif de ce patient sont présentés dans la section sur l’infarctus du VD.

Patient de 37 ans avec infarctus inférieur étendu au VD. Les volumes mesurés ici sur la pile de coupe axiales couvrant les ventricules droit et gauche indiquent :
Ventricule droit : VTD=144 ml, VTS=104 ml, VES=40 ml, FEVD=28%.
Ventricule gauche : VTD=105 ml, VTS= 56 ml, VES=49 ml, FEVG=47%.

Une discordance de moins de 20% entre les volumes d’éjection systolique droit et gauche se situe dans la gamme acceptable d’imprécision de la mesure.

Normes de volume pour le ventricule droit

Les valeurs normales de volumes et de masse du ventricule droit dépendent des méthodes de mesures (comme pour le ventricule gauche). Nous rapportons ici les résultats obtenus par l’équipe d’Alfakih (Magn. Reson. Imaging 2003;17:323–329), en ciné SSFP à partir d’une pile de coupes petit axe avec exclusion des piliers (non comptés dans la masse myocardique).

Index de volume et de masse VG et VD selon Alfakih
IVTD (H) IVTD (F) IMVG (H) IMVG (F) FE (H) FE (F)
VG 82±15 78±11 65±9 52±7 64±5 64±5
VD 86±14 75±14 env. 25 env. 23 55±4 60±5

Comme nous avions pu le constater dans le tableau consacré aux normes du VG, les valeurs de volume ventriculaire rapportées par Alfakih en technique SSFP sont supérieures aux normes de la plupart des auteurs et les valeurs de masse VG sont plus faible. Les normes concernant les enfants (8 à 17 ans) ont été publiées par Robbers-Visser 2009 [1].

On retiendra en pratique :

* L’IRM est un excellent outil, singulier, d’étude et de quantification du VD.
* Volumes et masse ventriculaires sont plus élevés chez l’homme que chez la femme.
* Les volumes ventriculaires droits sont un peu plus élevés qu’à gauche.
* La fraction d’éjection du VD est plus faible que celle du VG.
* La masse VD est 2 à 3 x plus petite que la masse ventriculaire gauche.

 

Evaluation coeur droit

L’anatomie du VD est décrite dans la section coeur normal. La volumétrie du VD et le calcul de la fraction d’éjection sont détaillées dans la section suivante.

Indices fonctionnels usuels (échocardiographie doppler)

L’indice TAPSE (tricuspid annular plane systolic excursion), qui quantifie l’excursion de l’anneau tricuspidien, est un marqueur simple et intéressant de l’état fonctionnel du VD.

Image:tapse3.jpg Ce déplacement est facile à mesurer sur les coupes axiales en ciné-IRM comme le montre la figure ci-contre (déplacement indiqué par la double flèche bleue sur l’image du milieu où les images diastolique et systolique ont été superposées).Un déplacement de moins de 15 à 20 mm entre la diastole et la systole constitue un indice de dysfonction VD avec une valeur pronostique démontrée.

Il est à noter que ce même mouvement constitue une source de difficulté majeure pour l’angio-IRM des artères coronaires.

L’indice de TEI (durée des périodes de relaxation + contraction isovolumique)/durée de l’ejection ventriculaire – N< 30-40% est également un indicateur fonctionnel interessant en écho-doppler (à partir des courbes de flux mitral et de flux aortique) mais n’est pas bien abordable en IRM. La mesure du dP/dt sur la courbe du flux de régurgitation tricuspidienne (N>1500-2000 mmHg/s) est un indice de contractilité intrinsèque qui n’est pas non plus accessible en IRM.

Les nouvelles méthodes écho-doppler, basées sur le ‘speckle tracking’ apportent des indices fonctionnels supplémentaires, en particulier pour l’étude du synchronisme VD (strain: déformations radiales ou longitudinales). En IRM, le tagging ou la cartographie des vitesses appliquée au myocarde pourraient, en principe, fournir des indices comparables mais la mise en oeuvre et le post-traitement de ces méthodes reste du domaine de la recherche.

Principaux états pathologiques du VD

Sur le plan morphologique, on distingue :

– les surcharges VD barométriques, en pression, qui entrainent une hypertrophie des parois myocardiques et résultent d’un obstacle sur la voie d’éjection droite (sténose pulmonaire, HTAP, embolie pulmonaire, BPCO).

– les surcharges volumétriques, dominées par une distension de la cavité VD. Ces dernières résultent essentiellement de cardiopathies congénitales : insuffisance pulmonaire, shunt de CIA, retour veineux pulmonaire anormal et suites de chirurgie réparatrice de tétralogie de Fallot.

L’augmentation de pression dans le VD va entrainer une inversion de la courbure septale : le VD prend la forme d’un VG et le VG prend alors une forme en croissant. Ces changements s’accentuent à mesure que l’on passe du coeur pulmonaire aigu (la dilatation transitoire du VD est le premier signe de l’embolie pulmonaire aigue) à l’HTAP constituée (coeur pulmonaire chronique post-embolique notamment). Dans un premier temps la cavité VD se dilate, le septum bombe vers le VG. Puis une HVD peut apparaitre, le VD devient sphérique et l’OD se dilate.

Enfin, il faut également évoquer l’infarctus du ventricule droit, la dysplasie du VD et le retentissement des déformations thoraciques comme le pectus excavatum.

Exemples d’HVD, combinant une hypertrophie myocardique avec une dilatation cavitaire chez un patient avec sténose pulmonaire (à gauche) et en cas d’HTAP primitive (3 cinés de droite). Noter le mouvement septal paradoxal prononcé en cas d’HTAP primitive et la distension majeure du tronc pulmonaire avec volutes de stagnation du flux sanguin.

L’étude de la compliance de la veine cave inférieure est ici capitale pour estimer les pressions de remplissage droites (cf: voir section sur la physiopathologie des atteintes péricardiques) et l’IRM en séquence temps réel est tout à fait capable de répondre à cette question comme cela est illustré par des exemples normaux et pathologiques.

L’atteinte du coeur droit peut également etre consécutive à une cardiopathie gauche (précoce en cas de cardiomyopathie dilatée hypokinétique, plus tardive en cas de cardiopathie ischémique), ou s’inscrire dans le cadre de maladies particulières. Citons par exemple le carcinoide du grèle (fibrose endomyocardique prenant surtout la tricuspide qui devient épaisse, rétractée, figée) ou la maladie des anticorps antiphospholipides pouvant donner un tableau similaire. D’autres formes de fibroses endomyocardiques peuvent également toucher le coeur droit (source de thrombi et de risque embolique). L’amylose cardiaque peut également intéresser le coeur droit et le septum inter-auriculaire.

Remplissage VG

L’étude de la fonction diastolique est un sujet complexe, dominé par l’échocardiographie doppler et où l’IRM n’occupe pas aujourd’hui une place opérationnelle. Nous rappelons ici les principes de base relatifs à l’appréciation du remplissage VG ainsi que les approches envisageables en IRM.

Sommaire

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Principes généraux d’étude du remplissage ventriculaire gauche

Le remplissage du VG est lié à deux propriétés du myocarde (Abergel, échocardiographie clinique de l’adulte, édition ESTEM 2003, p256-89):
– la relaxation VG, processus actif comportant la fin de l’éjection, le remplissage isovolumique et le remplissage rapide. Elle dépend surtout de conditions de charge (pressions).
– la diastole proprement dite, dépendant de la distension passive du VG (compliance).

Les anomalies de remplissage entrainent des problèmes pratiques importants puisque l’insuffisance cardiaque à fonction systolique preservée (FEVG > 45%) est fréquente chez le sujet agé et concernerait environ un tiers des insuffisants cardiaques.

En pratique clinique, la question n’est pas tant de détailler le mécanisme de la dysfonction diastolique mais surtout de définir s’il existe une élévation des pressions de remplissage du VG car cela aura une incidence très concrète sur la conduite thérapeutique, en incitant généralement à augmenter le traitement diurétique.

Image:doppler_mitral3.jpg Le remplissage ventriculaire gauche s’apprécie en échographie doppler pulsé, en mesurant le flux transmitral en incidence 4 cavités, au sommet de l’entonnoir mitral comme l’indique le schéma ci-contre.La courbe de flux mitral ainsi obtenue montre deux pics de vitesse : l’onde E correspondant au remplissage rapide initial et l’onde A correspondant au remplissage tardif sous l’impulsion de la systole auriculaire.

L’aspect typique normal chez le sujet de moins de 60 ans comporte une onde E (de l’ordre de 60 à 80 cm/s) plus ample que l’onde A. Le rapport E/A est > 1.

Le tableau ci-dessous résume les principaux aspects décrits par Appleton 1988 [1] et observés après 60 ans et en pathologie.

Troubles banals de relaxation Aspect ‘pseudo-normal’ Aspect restrictif
Image:flux_mitral_lad_web2_web.jpg Image:flux_mitral_normal_web.jpg Image:flux_restrictif_baut_web.jpg
E/A < 1 1<E/A<2 E/A>2
Pression de remplissage normale Pression de remplissage à voir selon DTI Pression de remplissage élevée

Le point pratique important à connaitre est la pression de remplissage du VG. La courbe de flux transmitral indique généralement des pressions de remplissage normales lorsque E/A<1 (troubles de relaxation) et des pressions généralement élevées lorsque E/A>2 (profil restrictif).

En cas de profil ‘pseudo-normal’ on ne peut pas conclure sur les pressions et il est alors nécessaire d’enregistrer la vitesse de déplacement de l’anneau mitral avec le doppler tissulaire (DTI – cf: voir ci-dessous) pour discriminer entre pressions de remplissage normales ou élevées (cf: Nageh 1997 [2] et Ommen 2000 [3]).

Image:dti1.jpg Image:dti2.jpg On mesure l’amplitude du déplacement de l’anneau mitral (repères sur l’image de gauche) induit par le remplissage rapide, correspondant à l’onde Ea (N>8 à 10 cm/s) et on fait le rapport E/Ea.Si E/Ea<10, les pressions de remplissage VG sont généralement normales (<12 mmHg), si E/Ea>15, les pressions sont généralement élevées. Entre ces 2 valeurs il existe une zone ‘grise’ et la mesure d’indices complémentaires est alors nécessaire.

Deux approches possibles du remplissage ventriculaire gauche par IRM

Deux indicateurs – illustrés ci-dessous – ont été proposés pour approcher la fonction de remplissage en IRM ; ils traduisent tous les deux la vitesse avec laquelle le sang entre dans le VG.

Les mesures effectuées à partir de la dérivée de la courbe de volume VG (volumétrie) et à partir des vitesses transmitrales (par cartographie des flux) devraient en principe contenir la même information et devraient correspondre à la courbe du flux transmitral mesurée en doppler. Remarquons d’ailleurs que les mesures IRM de vrai volume VG (sans modélisation) ou de vrai flux transmitral (et non pas de vitesse echantillonnée dans un petit volume, au centre de l’anneau mitral) devraient – en théorie – plus fidèlement représenter le remplissage VG que le doppler (dont le volume d’échantillonnage est limité, partiel). Dans la pratique, il faut bien reconnaitre que la mise en oeuvre des méthodes IRM, loin d’être routinière, est exposée à des imperfections techniques, manque de recul et d’évaluation clinique et ne saurait être concurrentielle avec les méthodes doppler qui sont parfaitement connues et maitrisées.

Par volumétrie du VG

La mesure précise et sans modélisation géométrique du volume VG s’effectue à l’aide d’une pile de coupe couvrant l’ensemble de la cavité (typiquement en incidence petit axe), en contourant l’endocarde sur l’ensemble des images.

Image:Evolume_derivee_510_220.jpg

La vitesse maximale de remplissage (peak filling rate), extraite de la courbe de dérivée du volume dans le temps, est un indice utile pour apprécier la fonction diastolique du VG. Cet indice est utilisé depuis les années 1980 en gamma-angiographie isotopique. Les valeurs normales (Bonow 1981 [4]) sont 3,3 ± 0,6 VTD/s (volume télédiastolique par seconde). Une vitesse maximale de remplissage < 2,5 VTD/s est pathologique. Le délai entre l’éjection maximale et la vitesse maximale de remplissage (time to peak filling rate) est également un bon indicateur de la fonction diastolique, qui serait moins sensible aux paramètres que constituent l’age et la FEVG. Sa valeur normale est de 136 ± 23 ms. Une valeur supérieure à 180 ms est pathologique.

Ces indicateurs dérivés de la courbe de volume nécessitent cependant une méthodologie rigoureuse de mesure avec notamment une résolution temporelle qui devrait être < 20 ms et un contourage précis de toutes les coupes à tous les instants du cycle cardiaque et veillant à ne pas effectuer une exclusion brusque de la coupe systolique basale sur la pile de coupes petit axe (ce qui entrainerait une discontinuité dans la courbe de volume et donc fausserait la dérivée !). C’est pourquoi cette méthode d’étude du remplissage VG n’est pas aisée à mettre en oeuvre de manière routinière en IRM.

Par fluximétrie transmitrale

La mesure du flux transmitral peut se faire par cartographie des flux ‘through plane’ selon le principe exposé dans le chapitre sur les valvulopathies, en choisissant un plan de coupe en double obliquité passant par l’anneau mitral.

Image:Rempli_VG2.jpg Image:Rempli_VG3.jpg

Sur la courbe de flux (à droite), on retrouve l’onde E (remplissage initial rapide) et l’onde A (correpondant à la systole auriculaire), décrites ci-dessus pour le doppler. Les profils d’écoulement décrits par Appleton (voir supra) peuvent etre retrouvés comme en doppler. Notons qu’il s’agit ici d’un vrai flux et non pas d’une vitesse echantillonnée au centre de l’anneau mitral comme avec le doppler.

Les difficultés pratiques pour cette approche sont multiples. 1) la résolution temporelle est médiocre avec les séquences en apnée (50 ms). Les séquences en respiration libre autorisent une meilleure résolution temporelle mais sont sujettes à des artefacts de flou cinétique lié à la respiration. 2) l’anneau mitral effectue des mouvements considérables d’entrée et de sortie à travers le plan de coupe fixe prescrit pour l’IRM. Ainsi, n’est ce pas exactement la même section d’écoulement que l’on mesure à chaque instant du cycle cardiaque, ce qui introduit un biais dans la mesure du flux transmitral.

En toute hypothèse, si l’on considère que la principale préoccupation du clinicien est d’estimer la pression de remplissage du VG, l’interprétation de cette courbe de flux transmitral est d’un intérêt limité tant que l’on ne dispose pas également de la courbe de déplacement de l’anneau mitral (cf: voir explications ci-dessus relatives au doppler). L’IRM montre certes très bien le déplacement de l’anneau mitral mais la mesure de la vitesse de déplacement de l’anneau mitral ne peut pas être aisément extraite des images, ce qui contraste avec la facilité de mise en oeuvre du DTI en écho-doppler.

Au total, si l’IRM est assurément l’outil d’excellence d’évaluation des volumes et de la fonction systolique, malgré des atouts potentiels (recherche) son intérêt pratique pour l’étude de la fonction de remplissage est très limité comparativement aux bénéfices apportés en routine clinique par l’écho-doppler.

Fonction VG segmentaire

Epaississement pariétal segmentaire

La mesure de l’épaisseur segmentaire s’effectue à partir des contours endocardiques et épicardique, généralement sur les coupes petit axe. La méthode du center-line (illustrée ci-dessous) est classiquement utilisée pour tracer les segments (cordes) perpendiculaires aux rebords endocardiques et épicardiques, permettant de déterminer les épaisseurs pariétales, ainsi que l’épaississement régional. Cette méthode décrite par Bolson (cf: Sheehan 1986 [1]) permet ainsi de mesurer de manière absolue les épaisseurs de paroi (entre endocarde et épicarde) et donc l’épaississement systolique segmentaire ainsi que le raccourcissement endocardique segmentaire ; elle a l’avantage ne pas reposer sur un point de référence central (barycentre) mais ne résout pas le problème délicat de translation ou de rotation éventuelle entre contour diastolique et systolique.

Exemple de détermination de l’épaisseur et de l’épaississement systolique segmentaire dans une coupe petit axe médio-ventriculaire chez une patiente présentant une cardiomyopathie hypertrophique septale asymétrique.

image:CMH_contours_diastole_web.jpg image:CMH_contours_systole_web.jpg
Coupe petit axe médio-ventriculaire Contours diastoliques Contours systoliques

Cartes polaires d’épaisseur diastolique et d’épaississement systoliques (images paramétriques) obtenues à partir de 5 coupes petit axe jointives chez cette patiente.

image:epaisseur_web.jpg image:epaississement_web.jpg
Coupe 4 cavités de la même patiente Carte de l’épaisseur diastolique Carte de l’épaississement systolique

On remarque sur cet exemple que les territoires septaux hypertrophiés (en bleu sur la carte d’épaisseur) sont également ceux qui présentent le moins bon épaississement systolique (en rouge sur la carte d’épaississement) ce qui traduit les conséquences fonctionnelles néfastes de la cardiomyopathie, avec perte régionale de la fonction systolique.

Raccourcissement endocardique segmentaire

Le raccourcissement segmentaire correspond au rapprochement de l’endocarde vers le centre du VG. Il traduit la contractilité régionale efficace, c’est à dire contribuant à l’ejection systolique du sang. Raccourcissement endocardique et épaisissement pariétal sont fortement corrélés mais quelques discordances peuvent apparaitre en présence d’une dysfonction systolique se manifestant sous forme de perte de l’épaississement systolique tandis qu’il persiste malgré tout un certain degré de raccourcissement segmentaire dans ce territoire, en raison d’un mouvement d’entrainement passif par les régions bordantes.

image:contractilite_web.jpg image:courbe_contractilite_web.jpg Carte polaire du raccourcissement segmentaire (à gauche)Au milieu, figure la courbe du raccourcissement segmentaire correspondant à la coupe illustrée dans la section précédente chez la patiente présentant une cardiomyopathie hypertrophique septale.

Comme pour l’épaississement segmentaire (ci-dessus), on observe un défaut de raccourcissement endocardique localisé dans le territoire septal hypertrophié (couleurs rouges sur la carte polaire).

Exemples d’analyse segmentaire post-infarctus

Infarctus antérieur

image:contour_D_mat.jpg image:contour_S_mat.jpg
image:map_ep_mat.jpg image:map_thck_mat.jpg

Infarctus inférieur

image:sin_psir_vga.jpg image:sin_contours_vga.jpg
image:sin_psir_pa.jpg image:sin_contours_pa.jpg