Les cardiomyopathies restrictives constituent un ensemble disparate dont le dénominateur commun est la gêne au remplissage ventriculaire alors que la fonction systolique peut rester normale. Dans ces situations les pressions droites sont souvent élevées et le tableau clinique peut conduire à évoquer une péricardite constrictive, d’autant plus que le profil hémodynamique au cathéterisme (égalisation des pressions et aspect en dip-plateau) est similaire à celui des péricardites constrictives.
Parmi les causes de fibrose cardiaque pouvant conduire à un état restrictif figurent notamment des affections qui n’évoquent pas a priori une péricardite constrictive comme la sarcoidose (avec foyers d’hypersignal post-gadolinium évocateurs), l’amylose (hypertrophie septale importante et hypersignal diffus assez caractéristique apres gadolinium – Van Geluwe 2006 [1]), ainsi que l’hémochromatose (diminution du temps de relaxation T2* traduisant la surcharge en fer). Cependant certaines atteintes cardiaques ne s’inscrivent pas dans de tels cadres bien définis et conduisent à des tableaux restrictifs avec dilatation des oreillettes et de la veine cave inférieure qui peuvent faire discuter la constriction péricardique.
Dans ces situations difficile, l’IRM revèle deux signes négatifs essentiels en faveur d’une cardiomyopathie restrictive :
1) ABSENCE D’EPAISSISSEMENT DU PERICARDE et
2) ABSENCE DE COUPLAGE VENTRICULAIRE PATHOLOGIQUE.
EXEMPLE DE CARDIOMYOPATHIE RESTRICTIVE
Patient de 36 ans, présentant des signes congestifs droits, sans antécédent pathologique notable et adressé en IRM pour suspicion de péricardite constrictive.
Dilatation de la VCI, du sinus coronaire et de l’oreillette droite. Pas d’anomalie péricardique.
Forte dilatation des deux oreillettes, fonction systolique des ventricules droit et gauche dans les normes.
Distension majeure de l’oreillette gauche avec flux lent tourbillonant mais pas d’aspect de stenose valvulaire mitrale et bonne fonction systolique du VG.
Imagerie ‘temps réel’ durant une manoeuvre de respiration ample. Pas d’inversion inspiratoire de la courbure septale comme on pourrait le voir en cas de couplage ventriculaire pathologique. Ceci permet d’exclure ici une péricardite constrictive.
L’hypertrophie myocardique est une cause fréquente de syndrome restrictif, notamment en cas de cardiomyopathie infiltrative, comme cela est illustré par ailleurs dans des cas d’amylose.
Analyse du péricarde et recherche de couplage ventriculaire pathologique apparaissent ainsi comme des atouts singuliers de l’IRM dans le difficile diagnostic différentiel entre péricardite constrictive et cardiomyopathie restrictive.
Le rétrécissement valvulaire aortique correspond à un obstacle gênant l’éjection du sang en systole et entrainant un gradient de pression entre le VG et l’aorte en raison de la réduction de la surface d’ouverture valvulaire.
L’étiologie principale de la sténose aortique est la dégénérescence fibro-calcifiée apparaissant avec l’age. La bicuspidie (cf: cliché ci-contre) est une condition qui favorise fortement cette évolution. Le rhumatisme articulaire peut également entrainer une sténose aortique et il existe des formes de sténose aortique congénitale, n’étant parfois détectées que tardivement chez l’adulte.
Comme pour l’insuffisance aortique, épaississements valvulaires et bicuspidie peuvent être assez bien objectivés par l’IRM mais les calcifications ne sont pas directement identifiables.
L’ouverture sigmoidienne est réduite. Un écartement systolique de moins de 8 mm signe une sténose serrée. L’hypertrophie ventriculaire gauche avec augmentation de l’épaisseur des parois est la principale conséquence de la surcharge barométrique (épaisseur septale diastolique > 12 – 13 mm).
Le signe direct de sténose aortique en IRM est le jet de perte de signal systolique dans la racine aortique, surtout apparent en écho de gradient à TE long (> 5 ms, comme sur l’exemple ci-contre), moins net en séquences SSFP à TE très court (TE de 1 à 2 ms, comme dans les exemples ci-dessous).
Exemple de sténose aortique moyennement serrée (1 cm2), sans bicuspidie :
Coupe frontale en ciné SSFP montrant un jet pathologique de perte de signal systolique dans l’aorte ascendante.
Coupe ‘5 cavités’ montrant une hypertrophie concentrique du VG et une faible amplitide d’ouverture des sigmoides aortiques.
Coupe orientée sur le plan des valves aortiques, montrant 3 cusps avec peu de calcifications mais faible ouverture systolique.
En cas de sténose aortique congénitale, chez les jeunes patients, la valve peut apparaitre comme un dôme percé sans qu’il soit possible d’identifier les feuillets valvulaires.
Quantification de surface valvulaire et de gradient par IRM
Deux indices permettent d’apprécier la sévérite du rétrécissement aortique : la surface d’ouverture de la valve et le gradient systolique.
Surface valvulaire
La surface valvulaire peut-être planimétrée de manière directe si le plan de coupe passe correctement, de manière homogène, sur les bords libres des valves en systole (plusieurs acquisitions successives, en replacant finement le plan de coupe ‘de proche en proche’, sont requises pour cela). Cette méthode a été validées (Friedrich 2002 [1]) comparativement à l’écho-doppler (équation de continuité) et au cathéterisme (méthode de Gorlin), avec une tendance à la surestimation de la surface aortique (Debl 2005 [2]) . Cette méthode est considérée comme une alternative valable à l’écho-doppler lorsque cet examen n’est pas concluant (John 2003 [3], Kupfahl 2004 [4]) mais sa mise en oeuvre exige un positionnement précis du plan de coupe (cf: avec les réserves similaires à celles déja évoquées précédemment pour le rétrécissement mitral).
Cartographie de flux
La cartographie de flux est l’autre méthode utilisable pour calculer le gradient aortique (Eichenberg 1993 [5]) ainsi que la surface aortique fonctionnelle, en utilisant l’équation de continuité (Caruthers 2003 [6]), comme en écho-doppler. Selon cette formule, connaissant la surface (S1) de la chambre de chasse de VG (déterminée à partir de son diamètre) et les intégrales temps-vitesse au niveau de la chambre de chasse du VG (VTI1) et au niveau de la sténose aortique (VTI2), la surface aortique S2 = (S1.VTI1)/VTT2.
Sténose aortique sur valve bicuspide assez fortement calcifiée au niveau de sa comissure postérieure (zones noires sur l’image de droite). La troisième image en partant de la gauche montre une cartographie de flux ‘in-plane’ en incidence parasternale grand axe, enfilant le jet accéléré de sténose aortique. Avec un encodage en vitesse à 3 m/s appliqué dans le sens cranio-caudal, une petite zone d’aliasing (tache systolique noire au dessus du plan aortique) apparait dans le flux aortique blanc en systole. D’après l’équation de Bernouilli simplifiée (G=4.V.V, avec G en mmHg et V en m/s), on peut en déduire que le gradient systolique aortique est au moins égal à 4.3.3=36 mmHg.
Sténose aortique peu serrée sur valves encore souples chez une patiente présentant surtout un rétrécissement mitral avec forte dilatation de l’oreillette gauche. La planimétrie directe de la surface d’ouverture des sigmoides aortique indique ici 1,2 cm2. La cartographie de flux ‘through-plane’ réalisée juste au-dessus du plan aortique indique une vitesse systolique maximale de 2,5 m/s, soit un gradient maximal de l’ordre de 25 mmHg.
L’HVG entrainée par la sténose aortique entraine des lésions de fibrose myocardique focale (sans signature clinique ni électrique), chez 32.5% des cas d’apres l’étude de Nassenstein 2009 [7] (40 patients sans atteinte coronaire dont la surface aortique était de 0.9±0.2 cm2). L’atteinte prédomine au septum basal et en inférieur et n’est pas de type ischémique car elle épargne les couches sous endocardiques. Elle s’associe à une masse VG accrue et à une FEVG moins bonne que chez les patients sans lésions fibreuse.
Au total: L’IRM est valable pour détecter une bicuspidie et en complément de quantification d’une sténose aortique
Critères classiques de sévérité de la sténose aortique (cf: inspiré de Klimczak [8])
La constriction péricardique est l’expression de la mauvaise tolérance hémodynamique en cas d’épaississement péricardique. Il importe d’insister sur le fait que l’aspect anatomique (épaisseur et étendue de l’épaississement pathologique du péricarde, calcifications associées) ne sont pas synomymes de constriction dont le diagnostic est évoqué sur des signes cliniques. Anatomie n’est pas synomyme de physiopathologie.
C’est ainsi que des épaississement ou des calcifications péricardiques peuvent ne pas entrainer de constriction
A l’inverse, il a été montré par Talreja 2003 [1] que pres de 20% des péricardites constrictives ne s’accompagnent pas d’épaississement péricardique notable.
TOLERANCE HEMODYNAMIQUE EN CAS D’EPAISSISSEMENT PERICARDIQUE
Les indices de retentissement fonctionnel qui traduisent l’évolution vers la constriction péricardique ont été abordés dans la section Physiopathologie. Il sont de deux types :
– La PERTE DE COMPLIANCE DE LA VEINE CAVE INFERIEURE lors de l’inspiration profonde, signe aspécifique apparaissant dès que les pressions dans l’oreillette droite s’accentuent. Cette condition a été décrite dans la section précédente consacrée à la tolérance hémodynamique des épanchements péricardiques avec perte de compliance de la VCI.
– Les signes de COUPLAGE VENTRICULAIRE PATHOLOGIQUE ([2],[3])
Couplage ventriculaire normal : La pression dans le VD est toujours inférieure à la pression dans le VG. La courbure septale est toujours convexe vers l’avant, vers le VD, en inspiration comme en expiration
HTAP permanente avec septum paradoxal. La courbure septale est inversée avec bombement permanent (en inspiration comme en expiration) vers le VG en raison de l’élévation des pressions droites
En cas de constriction péricardique, la gangue péricardique inextensible ne permet pas la dilatation physiologique inspiratoire du VD. Il en résulte une hyperpression ventriculaire droite en inspiration qui entraine un refoulement du septum ventriculaire vers la gauche (flèche blanche).
Noter sur cette acquisition ‘temps réel’ réalisée lors d’une manoeuvre de respiration ample, l’inversion de la courbure septale EN DEBUT D’INSPIRATION, lorsque le diaphragme descend, avec bombement transitoire du septum vers le gauche. Ce signe est un indicateur presque spécifique de constriction péricardique, même si le péricarde n’est pas épaissi.
Patient de 66 ans, aux antécédents de remplacement valvulaire aortique (St Jude), sans calcification péricardique, avec signes cliniques et échographiques évocateurs de péricardite constrictive. Les coupes axiales en écho de spin montrent un discret épaississement péricardique contre la paroi latérale du ventricule gauche (flèches). Peu d’anomalie sont notables en ciné mais les séquences temps réel lors de la respiration ample permettent de bien mettre en évidence une incurvation fugace du septum vers le VG en début d’inspiration, en faveur d’un début de constriction péricardique (couplage ventriculaire pathologique).
EXEMPLES DE CONSTRICTION AVEC COUPLAGE VENTRICULAIRE PATHOLOGIQUE
Patiente de 56 ans, avec signes congestifs droits et liseré de calcifications découvert sur la graphie thoracique, sans aucun antécédent évocateur.
Radiographie thoracique de profil montrant un liseré de calcifications curvilignes typique.
Cine petit axe montrant un épaississement péricardique antérieur relativement étendu.
Séquence ‘temps réel’ en coupe petit axe lors d’une manoeuvre de respiration ample montrant l’inversion de la courbure septale en début d’inspiration.
Coupe axiale médio-ventriculaire montrant l’épaississement péricardique prédominant devant le VD et dans une moindre mesure en apico-latéral derrière le VG.
Encoignure de la paroi antéro-basale du VD et aspect relativement figé du péricarde en regard ainsi que de la paroi externe de l’OD.
Séquence ‘temps réel’ en coupe sagittale lors d’une manoeuvre de respiration ample montrant l’absence de collapsus inspiratoire de la VCI qui est dilatée.
COUPLAGE VENTRICULAIRE PATHOLOGIQUE DU SEPTUM BASAL
Patient de 42 ans, aux antécedents de radiothérapie médiastinale pour maladie de Hodgkin à l’âge de 9 ans et de triple pontage coronaire pour sténoses coronaires favorisées par la radiothérapie 12 ans auparavant.
Perte de signal rétrosternale liée aux fils de sternotomie, ne permettant pas d’apprécier l’épaisseur du péricarde.Rigidité de la paroi libre antérieure du VD et aspect de septum paradoxal (sans bloc de branche gauche sur l’ECG).
Séquences ‘temps réel’ en coupe axiale (ci-dessus) et petit axe (ci-dessous) montrant l’inversion de la courbure du septum basal lors de l’inspirationCe signe de couplage ventriculaire pathologique est en faveur d’une constriction péricardique malgré l’absence d’épaississement péricardique
Patient de 54 ans, aux antécedents de myopéricardite il y a plus de 10 ans, présentant une polyarthrite rhumatoïde sévère, invalidante. L’échocardiographie avant traitement anti-TNF a montré une masse pathologique postéro-inférieure VG
ECHO DE SPIN T1Structure péricardique ovoïde inféro-latéro-basale de 3 cm de grand axe, en hyposignal T1
STIR – T2′La masse apparait en hyposignal T2
GRE-IR POST-GADORehaussement de signal périphérique autours de la pseudo-tumeur péricardique latéro-basale
CINE SSFP
TEMPS REELEcrasement du septum vers la gauche en début d’inspiration signant la constriction péricardique
Scanner sans injection iodée
Pile axiale native
Reconstruction petit axe’
MIP
Les vues scanographiques révèlent une importante ceinture de calcifications qui cercle les sillons auriculo-ventriculaires droit et gauche avec présence d’une masse de densité tissulaire striée de clous calcaires en inféro-latéro-basal correspondant à la pseudo-tumeur visualisée en IRM.
Cet exemple illustre encore la supériorité du scanner pour identifier les calcifications car l’aspect en hyposignal dans toutes les pondérations en IRM est également compatible avec un tissu fibreux à T1 long et à T2 court.
L’existence d’un couplage ventriculaire pathologique est un indice crucial pour le diagnostic différentiel avec les cardiomyopathies restrictives.
Les épaissisements fibreux tout comme les calcifications donnent le même aspect d’hyposignal en IRM, quelque soit la séquence utilisée, de sorte que ces deux formes pathologiques sont indiscernables en IRM. En outre, le scanner est extrêmement sensible pour déceler des petites calcifications, ce qui est crucial pour le diagnostic alors même que le péricarde ne parait pas nettement épaissi.
Noter l’aspect figé des contours épicardiques du VD et l’important épaississement péricardique en hyposignal homogène.
Le scanner cardiaque, en particulier s’il est synchronisé à l’ECG, permet d’identifier aisément les calcifications qui constituent un indice supplémentaire en faveur d’une évolution vers la constriction. L’injection iodée est nécessaire s’il s’agit d’analyser les cavités cardiaques ou les coronaires mais n’est pas indispensable pour la détection de calcifications.
Cette illustration – correspondant au même patient que ci-dessus – montre la supériorité du scanner par rapport à l’IRM pour mettre en évidence les calcifications (flèches).
Présentation en ‘rendu de surface’ des données scanographiques, ce qui est intéressant pour effectuer la cartographie des calcifications péricardiques dans le cadre du bilan pré-opératoire.
Les interventions de décortication péricardique sont en effet difficiles et fastidieuses et l’inventaire anatomique préalable est une aide pour le chirurgien, en particulier pour montrer les rapports des calcifications avec les artères coronaires et pour identifier des clous calcaires pénetrant dans le myocarde.
Calcifications péricardiques sans constriction
Patient de 73 ans aux antécédents d’asbestose avec pachypleurite calcifiée (flèches rouges) et présence d’un épaississement charnu sous jacent prenant le produit de contraste, suspect de mésothéliome. Les calcifications péricardiques multiloculaires, sans signe de constriction péricardique n’étaient pas objectivées en échographie.
Dans sa forme complète, les signes classiques de la péricardite constrictive sont :
– Épaississement péricardique localisé ou circonférentiel de plus de 4 mm d’épaisseur.
– Dilatation de l’oreillette droite et de la veine cave inférieure.
– Aspect ‘tubulisé’ du ventricule droit.
– Anomalies de contraction du septum avec fasseyement caractéristique (vibration avec aplatissement protodiastolique)
– Rigidité des contours épicardiques qui apparaissent comme ‘rivetés’, fixés à la ligne péricardique qui reste immobile ; les mouvements de contraction se faisant principalement par le recul de l’endocarde.
– Fréquent épanchement pleural associé.
Coupes 4 cavité et petit axe en écho de spin T1 montrant un épaississement circonférentiel du péricard de plus de 4 mm
Cine SSFP dans les mêmes incidences montrant l’hyposignal diffus du péricarde épaissiNoter l’épanchement pleural gauche
De surcroit, un hypersignal des feuillets péricardiques après injection de gadolinium a été décrit comme un marqueur d’inflammation vérifié en anatomie pathologique, en cas de péricardiqte constrictive (Ha 2006 [1]).
DIFFÉRENTES FORMES TOPOGRAPHIQUES DE PERICARDITES CONSTRICTIVES
EPAISSISSEMENT PERICARDIQUE NE SIGNIFIE PAS CONSTRICTION…
ATTENTION !
– Il importe de ne pas confondre les indices anatomiques et les conséquences fonctionnelles. Épaississement ne signifie pas constriction (et constriction n’impose pas forcément épaississement).
– En présence d’un épaississement péricardique, les signes cliniques congestifs droits (dont la forme la plus avancée est le syndrome oedémato-ascitique de Pick) et les résultats du cathétérisme montrant une égalisation des pressions entre oreillette et ventricule sont des signes de constriction.
– Le tableau clinique et les mesures de pression sont cependant identiques en cas de cardiomyopathie restrictive.
– La recherche d’un couplage ventriculaire pathologique en IRM apportera ici un indice déterminant pour le diagnostic de constriction et pour le diagnostic différentiel entre cardiomyopathie restrictive et péricardite constrictive.
On peut categoriser les épaississement péricardiques selon :
– La présence ou non de calcifications
– Leur caractère circonférentiel ou localisé (en particulier dans les sillons auriculo-ventriculaires)
LE SCANNER EST INDISPENSABLE POUR IDENTIFIER LES CALCIFICATIONS
L’IRM ne permet pas de différencier un épaississement fibreux d’une calcification car ces deux types de structures apparaissent sous forme d’un hyposignal non discriminant, quelque soit le type de séquence utilisée. La graphie thoracique (et surtout la scopie sous amplificateur de brillance) et le scanner (même non injecté) ont ici un rôle complémentaire crucial pour affirmer la présence de calcifications. Lorsqu’un épaississement péricardique est identifié il est donc impératif de réaliser ces examens ; la situation idéale étant de pouvoir immédiatement passer de l’IRM au scanner (si possible synchronisé à l’ECG même s’il n’y a pas d’injection iodée), dans la mesure où l’environnement de travail et la disponibilité des appareils le permettent, en sachant qu’une spirale scanographique en apnée est réalisée en une dizaine de secondes seulement ce qui est peu pénalisant pour un planing de travail ordinaire.
EXEMPLE D’EPAISSISSEMENT CIRCONFERENTIEL NON CALCIFIE
Observation d’un patient africain de 25 ans présentant des signes congestifs droits et des antécedents de tuberculose pulmonaire traitée durant quelques mois, 5 ans auparavant.
Pile de coupes axiales étagées en écho de spin pondéré T1 montrant un enveloppement cardiaque diffus par un épais tissu en hyposignal homogène atteignant 12 mm d’épaisseur avec veine cave inférieure dilatée
Cine SSFP medioventriculaire montrant l’aspect figé du cette gangue péricardique en hyposignalNoter l’épanchement pleural bilatéral
Pile de coupes axiales scanographiques (avec injection iodée) ne révelant aucune hyperdensité suspecte de calcification et demontrant ainsi que l’épaississement péricardique est purement fibreux
LE PERICARDE EST EPAISSI S’IL MESURE PLUS DE 4 MM EN IRM
Les causes les plus fréquentes d’épaississement et de constriction péricardique sont la chirurgie cardiaque, la radiothérapie, les infections, les maladies de système, l’urémie, les néoplasies. Les formes idiopathiques restent nombreuses.
L’IRM et le scanner synchronisé sont beaucoup plus performantes que l’échocardiographie pour estimer l’épaisseur du péricarde
La distinction entre épanchement péricardique et épaississement péricardique s’effectue grâce à l’aspect du signal en imagerie ciné par écho de gradient. Avec cette séquence, un épaississement fibreux ou calcifié apparait en hyposignal tandis qu’un épanchement apparaitrait en hypersignal, selon le tableau deja exposé précedemment :
ES T1
ciné (GRE, SSFP)
Epanchement
hyposignal
hypersignal
Hémorragie
hétérogène
hétérogène
Epaississement
hyposignal
hyposignal
Le critère d’épaississement pathologique est > 4 mm en écho de spin pondéré T1
Epaississement localisé du péricarde en avant du ventricule droit, identifié ici sous forme de ligne courbe en hyposignal de 5 à 6 mm d’épaisseur (flèche) cernée par l’hypersignal de la graisse épicardique du VD en arrière et par les franges adipeuses paracardiaques en avant. Cette image d’écho de spin isolée ne suffit pas pour poser le diagnostic car un décollement liquidien localisé pourrait donner le même aspect.
Coupe ciné en écho de gradient du même patient. La même ligne courbe prise en sandwich par les structures graisseuses se retrouve devant le ventricule droit. L’hyposignal de cette structure peu mobile prouve qu’il ne s’agit pas d’une formation liquidienne mais d’un tissu solide (fibrose ou calcification).
Deux exemples de péricardite constrictive visualisées en écho de spin T1. Le liseré en hyposignal d’épaisseur homogène en avant des cavités droites (flèches) correspond ici à un épaississement du péricarde mais la seule séquence d’écho de spin montrée ici ne suffit pas pour affirmer qu’il ne s’agit pas d’un discret épanchement liquidien. Une séquence complémentaire en écho de gradient (ciné) est nécessaire pour faire le diagnostic différentiel
ELEMENTS A RETENIR SUR L’IRM DES EPANCHEMENTS PERICARDIQUES
– aspect IRM de l’épanchement liquidien = hyposignal en écho de spin T1 / hypersignal en ciné écho de gradient
– Epanchement hémorragique = signal hétérogène quelque soit la pondération
– Ne pas se laisser tromper par les recessus péricardique (ne pas confondre avec une masse médiastinale)
– Intérêt de l’IRM dans les épanchements localisés, cloisonnés pouvant échapper à l’échographie
– Le diagnostic différentiel entre épanchement liquidien et graisse paracardiaque est très facile en IRM
– Le diagnostic d’inflammation (péricardite ± myocardite) est accessible grâce au gadolinium
– Considérer le péricarde comme une entité fonctionnelle et non pas seulement comme une structure anatomique
– L’écrasement cyclique de la paroi externe de l’OD ne constitue pas obligatoirement un signe de tamponnade
– La perte de compliance de la veine cave inférieure (temps réel durant la respiration) traduit l’élévation de pression dans l’OD
– L’IRM (et le scanner) sont supérieurs à l’échographie pour la recherche étiologique (tumeur).
RECOMMANDATIONS DES SOCIETES SAVANTES
Selon le groupe de consensus de la société Européenne de Cardiologie, l’IRM présente une indication de classe III dans le bilan des épanchements péricardiques (Europ H J 2004, 25, 1940-65 [1]).
Selon l’American College of Radiology [2], cet examen est bien approprié dans le bilan des atteintes péricardiques (score d’indication 8).
La compliance de la veine cave inférieure, s’étudie en examinant sa variation de calibre durant le cycle respiratoire. Normalement, le diamètre de la VCI se réduit d’au moins 50% en inspiration. Plus les pressions droites sont élevées, plus la réduction de calibre de la VCI va s’estomper…
Illustrations de la méthode d’analyse par échographie. On peut estimer visuellement la variation de calibre de la VCI à partir de l’image bidimensionnelle (à gauche).La représentation TM (image du milieu) permet également de bien suivre (et quantifier) la réduction de calibre inspiratoire (le diamètre antéro-postérieur passant ici de 16 à 8 mm).
La bonne compliance de la veine cave inférieure peut également s’étudier grâce aux séquences d’IRM ‘temps réel’. Il s’agit de séquences rapides SSFP, non synchronisées à l’ECG, avec des temps d’écho très courts (TE 1 ms) et mettant en oeuvre les méthodes d’accélération de l’acqusition (imagerie parallèle – iPat 2 – utilisant plusieurs antennes en quadrature). La résolution temporelle est de l’ordre de 90 ms avec une résolution spatiale de l’ordre de 3 mm dans le plan (matrice 128×128).
Normalement, la veine cave inférieure présente une franche réduction de calibre en inspiration, voire un véritable aspect de collapsus inspiratoire physiologique.Plus les pressions droites sont élevées, plus la réduction de calibre de la VCI va s’estomper…
Imagerie temps réel en coupe axiale sur la veine cave inférieure montrant une forte réduction de calibre physiologique durant l’inspiration, ce qui est en faveur de pressions basses dans l’OD.
Imagerie temps réel en coupe sagittale sur la veine cave inférieure confirmant le quasi collapsus inspiratoire de la VCI (il faut être prudent avec cette incidence sagittale car la lumière cave risque de sortir du plan de coupe lors de la respiration profonde)
Cet aspect de compliance cave normale peut être observé même en cas d’épanchement abondant , si sa constitution est progressive et lente comme le montre les illustrations accessibles par ce lien.
PERTE DE COMPLIANCE DE LA VEINE CAVE INFERIEURE
La perte de compliance de la veine cave inférieure, traduisant l’élévation des pressions droites, est un indicateur mieux corellée à la mauvaise tolérance hémodynamique que l’écrasement cyclique de l’OD dans les épanchements.
Les anomalies recherchées par cette méthode ne sont pas spécifiques et concernent toutes les causes d’élévation des pressions droites : tamponnade, constriction péricardique, HTAP…
L’altération de compliance de la veine cave inférieure, traduisant des pressions droites anormalement élevées, s’objective par l’absence de variation de calibre durant le cycle respiratoire.
Absence d’aplatissement inspiratoire du calibre de la VCI traduisant une pression élevée dans l’oreillette droiteCet absence d’aplatissement physiologique accompagne les signes cliniques congestifs droits (turgescence des jugulaires, oedèmes des jambes). Dans la tamponnade et dans la constriction péricardique, on note une hypotension, une diminution des bruits du coeur, une diminution inspiratoire du pouls et de la tension artérielle (pouls paradoxal de Kussmaul).
Imagerie temps réel en coupe axiale sur la veine cave inférieure montrant une faible variation de calibre de la VCI qui reste dilatée durant l’inspiration chez un patient en insuffisance cardiaque globale sur cardiomyopathie dilatée hypokinétique.
Chez ce patient présentant un volumineux épanchement péricardique, la VCI garde un calibre distendu et constant durant le cycle respiratoire, témoignant de pressions élevées, faisant craindre une tamponnade et plaidant en faveur d’une péricardocentèse.Noter l’épanchement pleural droit associé
Deux catégories d’indices explicités dans la section Physiopathologie permettent d’apprécier en IRM le retentissement d’un épanchement sur les cavités cardiaques et la tolérance hémodynamique :
– La compression des cavités cardiaques.
– La perte de compliance de la veine cave inférieure lors de l’inspiration profonde.
Il importe de rappeler que la tolérance hémodynamique n’est pas tant liée à l’abondance de l’épanchement mais est surtout dictée par sa vitesse de constitution (car le feuillet pariétal nécessite un certain temps pour s’étirer). C’est pourquoi il est possible d’observer des épanchements volumineux sans signe de mauvais retentissement comme dans cet exemple.
Compression des cavités cardiaques
Le premier signe de retentissement, facilement décelable en IRM, est la compression cyclique de la paroi externe de l’oreillette droite.Cette paroi mince est facilement dépressible, d’autant que la pression dans l’oreillette droite est faible.
Un enfoncement plus ou moins marqué de cette paroi externe est souvent visible, pouvant parfois apparaitre comme un début de collapsus périodique lorsque l’écrasement pariétal est prononcé.
Ce signe précoce ne signifie pas que la tolérance hémodynamique est mauvaise.
Cine SSFP en coupe frontale montrant un épanchement péricardique moyennement abondant avec écrasement cyclique partiel de l’oreillette droite. Noter la présence de franges épicardiques prohéminentes
Coupe frontale du même patient montrant l’invagination partielle de la paroi externe de l’OD en diastole, lorsque les ventricules se remplissent et que la pression intrapéricardique augmente.
Autre exemple d’écrasement télédiastolique de l’OD
Noter sur cette observation que la compression de l’OD s’effectue ici en systole et non pas en diastole…
Beaucoup plus péjoratif serait l’écrasement cyclique de la paroi libre du ventricule droit, correspondant à une mauvaise tolérance hémodynamique et s’inscrivant alors dans un tableau de tamponnade.
La perte de compliance de la veine cave inférieure, traduisant l’élévation des pressions droites, est un meilleur indicateur de mauvaise tolérance hémodynamique de l’épanchement que l’écrasement cyclique de l’OD.